Et c’est reparti pour une année ! La plateforme d’accès à l’enseignement supérieur Parcoursup®, héritière d’APB, a ouvert ses portes le 20 janvier dernier et les élèves de terminale sont invités à exprimer leurs souhaits concernant la poursuite d’études après le baccalauréat. Ils ont jusqu’au 29 mars prochain pour saisir leurs vœux sur la plateforme. La date limite pour la validation définitive des vœux aura lieu, une semaine après, le 7 avril 2022.
Retrouvez le calendrier 2022 détaillé de Parcoursup® !
Parcoursup® recense plus de 19 500 formations diplômantes et reconnues par l’État. Cette année, de nouveaux cursus intègrent la plateforme, notamment le Bachelor universitaire de technologie (BUT) qui remplace progressivement le DUT depuis la rentrée 2021. Sous les conseils avisés de leurs enseignants, responsables pédagogiques, ou bien des conseillers d’orientation, les lycéens peuvent formuler jusqu’à 10 vœux maximum, dont 20 sous-vœux.
Les lycéens planchent sur leurs dossiers, sur fond d’espoir et de craintes
Du côté des élèves, la prise en main de la plateforme n’est pas toujours intuitive. En pleine préparation de leurs candidatures, certains lycéens sont quelque peu déconcertés. « Pour l’instant, j’ai finalisé la rubrique “Activités” et “Centres d’intérêt”, mais je n’ai pas commencé les lettres de motivation, je sais pas trop comment m’y prendre », admet Victoria, en terminale générale spécialité Physique-Chimie et SVT, près de Rouen (Seine-Maritime).
La jeune fille de 18 ans qui a pour projet de devenir vétérinaire a émis des vœux pour intégrer une école de vétérinaire. Coup de chance : il est possible, depuis 2021, de passer par la plateforme pour candidater. En effet, la classe prépa n’est plus requise pour devenir vétérinaire, les élèves se soumettent désormais à un concours national. Par sécurité, Victoria a également choisi des vœux en licence de SVT dans plusieurs villes françaises.
Sarah*, également en terminale générale, spé mathématiques et LLCER anglais d’un lycée de l’académie de Créteil est plutôt confiante. Désireuse d’être admise en école d’architecture ou un cursus pour obtenir le DNMADE (Diplôme des métiers d’arts et du design), elle n’a pas eu trop de difficultés à faire ses vœux. « La prise en main de la plateforme Parcoursup® n’est pas trop compliquée ; nos professeurs principaux nous ont aidés aussi avec des cours d’orientation », explique la lycéenne.
En plus de cette aide précieuse, la future bachelière a pu aussi se rendre aux salons étudiants ainsi qu’aux JPO organisés par les établissements. « Cela m’a bien aidée. À la JPO d’une école d’architecture, j’ai pu discuter avec des étudiants et une prof qui a lu ma lettre de motivation. Elle m’a aussi corrigée, donné des conseils », confie Sarah.
Si les filières générales n’ont aucun mal à choisir des cursus dans l’enseignement supérieur, la tâche s’avère plus épineuse pour les voies professionnelles. Ayrton, 17 ans, est en terminale pro Systèmes numériques à Bourges (Cher). Ce jeune apprenti a opté pour des vœux en BTS SIO (Services Informatiques aux Organisations) pour la rentrée prochaine. « J’ai toujours été un “bon élève”, j’oscille entre 15 et 17 de moyenne », affirme-t-il.
Mais ce dernier n’a eu que très peu d’informations ou d’aide de son lycée et se sent démuni pour la suite de ses études. « Une seule prof nous a aidés et ce n’était pas notre principale », relate-il. « Je suis en bac pro, j’ai moins de connaissances dans les matières générales. Puis, dans les établissements que j’ai demandés à Clermont-Ferrand et Saint-Étienne, très peu de bacs pros sont pris ».
Parcoursup® : source de stress ?
Les lycéens sont donc sur le qui-vive et s’empressent de boucler leurs dossiers, mais ils ne sont pas les seuls. Agathe Garnier, enseignante de SVT et professeure principale de terminale au lycée Henri-Loritz de Nancy (Meurthe-et-Moselle), avoue avoir quelques craintes. « Je suis quand même mitigée face à Parcoursup®. C’est compliqué, c’est obscur, ça met les élèves en tension et il y a quand même un poids de la note qui est assez terrible », raconte-elle.
Malgré tout, l’enseignante propose régulièrement, depuis le début de la rentrée scolaire des séances d’orientation et de conseils, afin d’aider au mieux ses élèves. « Il faut quand même qu’on les accompagne », indique-t-elle.
« Ils sont un peu perdus, ils ont peur de ne pas être pris, c’est pour ça qu’ils veulent cumuler les vœux », Agathe Garnier
Avec la date de clôture des vœux qui approche à grands pas, Agathe Garnier incite ses lycéens pour qu’ils finissent au plus vite leurs dossiers, car certains éléments sont importants, notamment pour les conseils de classe. « Il nous faut absolument leurs vœux parce qu’on se prononce dessus au 2e trimestre, c’est-à-dire, si on est favorables ou réservés pour la suite de leurs études », rappelle-elle.
Par ailleurs, Agathe reconnaît une certaine pression sur les élèves. Quelques-uns de sa classe ont demandé des vœux dans des formations qu’ils ne souhaitent pas faire. « Je leur dis, “tu ne vas pas faire des vœux que tu ne veux pas” » déclare Agathe, avant de poursuivre : « ils sont un peu perdus, ils ont peur de ne pas être pris, c’est pour ça qu’ils veulent cumuler les vœux ». Pour elle, Parcoursup® génère une pression sur les élèves qu’ils n’avaient pas avant. « C’est encore pire maintenant, car Parcoursup® brasse énormément de formations ».
les gens qui arrivent à ouvrir parcoursup sans faire de crise d’angoisse expliquez-moi svp
— léna (@lena_gdrt) February 27, 2022
Peur du refus et incertitudes face à l’avenir
Comme chaque année, la peur de ne pas être admis dans la formation de ses rêves est sur toutes les lèvres des lycéens. Ils sont très motivés, mais redoutent le pire. « J’ai toujours été une bonne élève, sérieuse et soucieuse de réussir. Alors oui, mon dossier me semble bon », indique Victoria. « Je trouve que les écoles en demandent beaucoup pour notre âge. Je suis certaine à 75 % que je ne serais pas acceptée en école véto et je vise la licence ».
« Le fait qu’une plateforme décide de briser ou non mon rêve, ça me rend folle » Victoria, 18 ans
La sélection et l’algorithme de Parcoursup® terrifient les lycéens ; qui ne le prennent pas toujours d’un bon œil. « Anxiété, crainte… que du négatif. Le fait qu’une plateforme décide de mon avenir ainsi que de briser ou on mon rêve, ça me rend folle », s’inquiète-elle.
Le jeune terminale de bac pro n’est pas rassuré non plus : « Bien que j’aie de l’expérience dans le monde du travail, j’éprouve beaucoup d’appréhension concernant Parcoursup® », affirme-il. « On nous met la pression au lycée, en nous disant que certains n’ont pas été acceptés pour une seule mauvaise appréciation. Je suis un peu distrait et désorganisé, mais on me dit que je suis dans les meilleurs et que je devrais m’en sortir ».
De son côté, Agathe Garnier admire la ténacité et la motivation de ses élèves. Pour ajouter des cordes à leur arc dans leur projet de formation motivé, certains de ses lycéens ont réalisé des stages de découverte d’une journée ou deux dans des entreprises convoitées. D’autres ont également fait des immersions dans certaines écoles de l’académie. « Si la formation en face est d’accord pour les prendre ; par exemple, une école d’ingénieurs de la région, on fait une liste des intéressés et puis on les envoie une demi-journée », explique-elle. « Ils prennent ça sur leurs vacances scolaires ; cela montre quand même une certaine détermination ! »
Pour l’enseignante de SVT, Parcoursup® « reste malgré tout le stress des lycéens ». Ces derniers ont pu, contrairement à leurs aînés, se consacrer à l’orientation grâce au report des épreuves de spécialités de mars à mai 2022. « Ça les a aidés et il y aura encore des aménagements pour les épreuves, car la crise sanitaire n’est pas terminée », avertit Agathe Garnier. « Il y a un problème avec le classement des élèves, on le sait, c’est compliqué avec la réforme et l’accès au supérieur est compliqué pour eux », conclut-elle.
Depuis sa création en 2018, les critiques à l’égard de Parcoursup® vont bon train, tant par la communauté éducative et les élèves, que par les personnalités politiques. Plusieurs candidats à la présidentielle, essentiellement à gauche, ont exprimé leur souhait de supprimer cette plateforme. Ainsi, Anne Hidalgo (PS) compte « abroger » Parcoursup®, Yannick Jadot (EELV) veut en finir avec cette « boîte noire », Jean-Luc Mélenchon (LFI), lui, veut « supprimer cette ignominie » tandis que Fabien Roussel (PC) qualifie le site de « Koh-Lanta de l’orientation ».
*Le prénom a été modifié