Fondé sur des rapports de domination et d’intimidation, le harcèlement est une violence qui a un effet délétère sur les conditions de vie de la victime et un impact sur sa santé physique ou psychique.
Si le harcèlement scolaire, puni par la loi, concerne principalement le volet moral, les établissements d’enseignement supérieur font également face à des cas de harcèlement d’ordre sexiste et sexuel. L’émergence des pratiques virtuelles a créé, quant à elle, de nouveaux types de harcèlement.
Une enquête réalisée par Diplomeo auprès de 2 312 jeunes âgées de 16 à 25 ans révèle que 17 % d’entre eux ont été harcelés au moins une fois sur les réseaux sociaux.
Tu as déjà été victime de cyberharcèlement ou d’autres formes de harcèlement à l’école ? Si tu cherches de l’aide, voici tout ce que tu dois savoir pour te protéger.
Qui contacter en cas de harcèlement scolaire ?
Tu es victime de harcèlement à l’école ? Tu peux contacter le 3018 7 jours sur 7, de 9 h à 23 h (jours fériés inclus). Tu seras mis en relation avec une équipe d’écoutants composée de psychologues, de juristes ou encore d’experts du numérique. Tu l’as bien compris : même s’il n’est pas toujours évident de se confier sur ces sujets, des professionnels sont à ton écoute.
Le dispositif 3018 propose également de :
- stocker dans un coffre-fort numérique et sécurisé des preuves du harcèlement (captures d’écran, photos…)
- réaliser une auto-évaluation de ta situation à l’aide d’un quiz nommé « Suis-je harcelé ? »
- prendre connaissance de fiches conseil sur le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement, afin de savoir comment réagir et à qui tu peux faire appel
Si tu ne parviens pas à appeler ce numéro, tu peux aussi recourir à ton entourage. Tu peux discuter avec des professeurs, mais surtout des proches de confiance, comme tes parents, tes frères et sœurs, etc., qui t’entourent et pourront te soutenir.
Et si ce n’est toujours pas le cas, sache que la loi te soutient. Le harcèlement scolaire constitue un délit pénal, passible de dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende, en cas de suicide ou de tentative de suicide de la personne harcelée. Pour le volet moral, deux ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende sont requis.
De fait, les faits de harcèlement moral commis à l’encontre d’autrui constituent un harcèlement scolaire. La loi du 2 mars 2022 concerne à la fois les élèves, les étudiants et le personnel des établissements universitaires ou privés, primaires et secondaires. Sache que même si toi ou ton harceleur n’êtes plus sur les bancs de l’école, des sanctions peuvent toujours être prononcées.
D’après l’article L. 511-3-1 de la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance : « aucun élève ne doit subir, de la part d’autres élèves, des faits de harcèlement ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions d’apprentissage, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d’altérer sa santé physique ou mentale. »
En conséquence : tous les corps de métiers de la fonction publique, ainsi que les personnels soignants doivent recevoir une formation à la prévention des faits de harcèlement scolaire ou universitaire et à la prise en charge des victimes, des témoins et des auteurs de ces faits.
D’autant plus que l’adolescence est une période de découverte et de questionnement, notamment sur sa sexualité. Le 18 janvier dernier, Pap Ndiayie, alors ministre de l’Éducation nationale a déclaré lors d’une prise de parole larmoyante au Sénat : « La lutte contre le harcèlement scolaire, la lutte contre l’homophobie (…) doit demeurer une priorité du Gouvernement. L’orientation sexuelle est souvent un point d’appui pour les auteurs de harcèlement ».
Une lutte contre le harcèlement reprise plus tard par son successeur, Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale fin 2023, qui s’attachait à ce que « la peur et la honte » changent de camp.
Qui contacter en cas de harcèlement sexuel ?
L’article 222-33 du Code pénal définit le harcèlement sexuel comme le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant. Ce délit est puni de deux à trois ans de prison et de 30 000 à 45 000 € d’amende.
Clasches, collectif de lutte anti-sexiste contre le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur, a mis sur pied un guide pratique de 72 pages à destination des étudiants et étudiantes, afin qu’ils puissent s’informer et se défendre contre ce type de harcèlement. Tu y trouveras notamment des exemples de lettres, de plaintes et de témoignages.
Selon ta structure, il existe plusieurs organismes vers qui se tourner en cas de harcèlement sexuel.
Les contacts en établissements publics
Dans un établissement public comme une université ou un IUT par exemple, en plus du volet pénal, des sanctions disciplinaires peuvent être appliquées contre les mis en cause.
Voici une liste non exhaustive de personnes à contacter en cas de harcèlement sexuel :
- les personnels de santé et d’action sociale de ton établissement, comme les SUMPPS (Service Universitaire de Médecine Préventive et de Promotion de la Santé) ou le service social du CROUS
- la mission égalité femmes-hommes obligatoire dans les universités publiques, relativement à la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013
- les associations étudiantes
- les syndicats étudiants
- tes professeurs et encadrants
- etc.
Les contacts en établissements privés
Si les écoles sont un peu moins encadrées que la faculté, les enseignants ou autres intervenants sont toujours là pour t’épauler. Dans le cas contraire, la justice pénale peut toujours intervenir et sanctionner via plusieurs acteurs :
- le Défenseur des droits (démarche en ligne et gratuite)
- les avocats spécialisés
- la fédération France victimes
- SOS racisme (si le harcèlement est à caractère raciste)
- les associations étudiantes comme la FAGE (Fédération des associations générales étudiantes), par mail à l’adresse mesdroits@fage.org.
Harcèlement : les cellules d’écoute dans le supérieur
La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique oblige chaque établissement public à mettre en place un dispositif de signalement des actes de violence, de discrimination, de harcèlement et d’agissements sexistes. Ce dispositif doit comprendre :
- l’écoute et recueil du signalement
- l’orientation des victimes et témoins vers les services et professionnels compétents chargés de leur accompagnement et de leur soutien
- l’orientation des victimes et témoins vers les autorités compétentes en matière disciplinaire.
Au fil du temps, ces cellules d’écoute se sont généralisées à tout l’enseignement supérieur pour prévenir le harcèlement. À Montpellier Business School par exemple, l’administration est constituée d’acteurs formés à ces questions, mais des plateformes d’accompagnement juridique ou psychologique sont également mises à disposition des étudiants.
De son côté, Kedge Business School s’est dotée de deux types de cellules, selon la gravité :
- une cellule d’aide psychologique dite « wellness » qui concerne le bien-être général des étudiants
- une cellule de signalement de faits de discrimination ou harcèlement en tous genres.
En fonction de l’événement, un certain nombre d’actions peuvent être engagées, allant du simple rappel à l’ordre, jusqu’au conseil de discipline, en passant par une plainte au procureur de la République, si nécessaire.
À l’université de Lorraine, une première écoute est réalisée par un psychologue. Après enquête, il est décidé d’aller ou non vers une section disciplinaire. Dans ce genre de cas, l’intervention d’assistants sociaux du SUMPPS est nécessaire pour appuyer les médecins.
L’université de Lille est, quant à elle, parmi les premières à avoir lancé une CEVIHS (Cellule de veille et d’information sur le harcèlement sexuel) en 2008. À l’époque, les réseaux sociaux n’avaient pas autant de place que de nos jours.
Qui contacter en cas de cyberharcèlement ?
En cas de harcèlement sur la toile, plusieurs options gratuites sont possibles :
- contacter le 3018 7 j sur 7 de 9 h à 23 h
- contacter le 17 24 h sur 24h, 7 j sur 7
- télécharger l’application "3018"
- signaler les contenus inappropriés directement sur la plateforme concernée
- signaler les faits sur le site dédié du ministère de l’Intérieur
- en parler à des personnes de confiance ou des professionnels.
La loi Schiappa de 2018 a élargi la définition du cyberharcèlement. Depuis, il est possible de réprimer les attaques coordonnées de plusieurs internautes, même lorsque chacune des personnes n’a pas agi de façon répétée. Le juge peut distinguer l’instigateur et les comparses et adapter les peines à la gravité des actes commis.
Pour mieux lutter contre le harcèlement sur les réseaux sociaux, les outils numériques utilisés pour harceler un élève ou un étudiant pourront être saisis et confisqués au sein d’un établissement scolaire. Le gouvernement a par ailleurs annoncé qu’une information sur les risques liés au harcèlement scolaire et au cyberharcèlement sera dispensée chaque année aux élèves et aux parents d’élèves.
Les cyberharceleurs encourent jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Si la victime est mineure de moins de 15 ans, les peines sont de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Les démarches à suivre pour lancer une procédure judiciaire
Même si la justice s’inscrit dans le temps long, elle sert à réparer le préjudice moral ou physique qui t’a été fait. Si tu souhaites aller jusque-là, voici la manière dont tu peux procéder :
- se rendre à la police ou à la gendarmerie
- écrire au procureur de la République
- se constituer en partie civile en cas de classement sans suite ou de non-réponse du procureur
- convoquer l’agresseur en citation directe devant le tribunal correctionnel
Il est important de te renseigner sur le contexte juridique du harcèlement avant de déposer ta plainte, afin d’avoir le meilleur dossier possible. De même que pour les agressions sexuelles, les délits de harcèlement sexuel sont prescrits au bout de six ans à compter du dernier acte, geste ou propos.
Passé ce délai, la plainte n’est plus recevable, mais peut tout de même être déposée. À noter que la prescription est de 20 ans pour un viol et de 30 ans s’il s’agit de crimes sexuels commis sur mineurs.
Moqueries, insultes, violences physiques, violences sexuelles et sexistes… le milieu scolaire n’est pas toujours bienveillant, c’est pourquoi une myriade de choix s’offre à toi pour en parler. Proches, cellules d’écoute, psychologues ou autres professionnels de la santé sont à ta disposition en cas de situation de harcèlement. Si aucune de ces solutions ne fonctionne, tu as la possibilité d’entamer des poursuites judiciaires !