Stress, manque de sommeil, précarité : l’état critique des étudiants en soins infirmiers

Une nouvelle étude nationale met en lumière l’état de santé physique et mental préoccupant des étudiants en soins infirmiers (ESI). Une situation qui se dégrade d’année en année et face à laquelle les auteurs de l’enquête appellent à agir.
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© Association SPS (soins aux Professionnels de santé) et « Réussis ton IFSI »

Depuis plusieurs années, les études se multiplient pour alerter sur l’état des étudiants en soins infirmiers (ESI). Une situation préoccupante qui ne cesse de se détériorer malgré les initiatives contre l’épuisement professionnel des soignants. Voici ce que nous apprend une nouvelle enquête nationale réalisée par l’association SPS (soins aux Professionnels de santé) et « Réussis ton IFSI », publiée mi-novembre. 

Les deux organismes ont interrogé plus de 6 000 étudiants, dont une majorité de femmes, entre mai et juin 2024. Dans ce rapport, ils cherchent à « mieux comprendre les besoins des étudiants et proposer des mesures concrètes pour améliorer leurs conditions de formation », expliquent-ils dans un communiqué. 

Près de 8 étudiants infirmiers sur 10 ont envisagé d’abandonner leurs études

Tous les voyants sont au rouge. Alors que la majorité (81%) des étudiants en soins infirmiers a choisi ses études par « désir d’aider les autres », nombreux sont les étudiants qui déchantent, dès la première année de leur cursus. En effet, ils se heurtent très vite à plusieurs types de difficultés : 

  • 63% signalent des difficultésprofessionnelles liées aux stages et aux relations avec le personnel encadrant. « Les encadrements durant les stages sont médiocres, les étudiants sont souvent pris pour des larbins », témoigne un des étudiants interrogés
  • 57% évoquent des difficultés institutionnelles, telle que la gestion des cours et des examens. « La première année est trop dense, c’est presque insupportable », avance un autre étudiant.
  • 33% évoquent des difficultés personnelles, liées à des problèmes de santé, familiaux ou financiers
  • Seuls 9% des étudiants déclarent n’éprouver aucune difficulté 

Dans ce contexte, 77% des ESI ont déjà envisagé d’abandonner la formation. Un taux en hausse par rapport à 2022 (59,2%). Si le taux d’abandon effectif en 2021 est de 10% la première année (soit trois fois plus qu’il y a 10 ans !) et de 14% sur l’ensemble du parcours d’études en soins infirmiers, « l’intention d’abandon reste un indicateur important de la vulnérabilité des étudiants », alerte l’étude. 

Capture d'écran de l'étude sur les conditions de formation des ESI. © Association SPS (soins aux Professionnels de santé) et « Réussis ton IFSI »

D’autant que « les tensions et les désillusions tendent à augmenter à mesure que les étudiants se rapprochent de la fin de leur formation », souligne le rapport. 

Une intention d’abandon encore plus élevée chez les étudiants en situation de handicap

12% des sondés se déclarent en situation de handicap et, parmi eux, 82% envisagent d'abandonner leurs études. La majorité estime en outre que les aménagements mis en place ne sont pas suffisants. 

Manque de sommeil, mauvaise alimentation et précarité

Autre constat préoccupant : la santé physique des étudiants en soins infirmiers, qui se dégrade à mesure qu’ils avancent dans leurs études. La majorité d’entre eux évalue sa santé physique comme « moyenne ». 21% des étudiants la considèrent même « mauvaise », voire « très mauvaise ». 

Capture d'écran de l'étude sur les conditions de formation des ESI. © Association SPS (soins aux Professionnels de santé) et « Réussis ton IFSI »

«On nous dit qu’il faut prendre soin de notre santé, mais on a toujours peur, en tant qu’étudiant, d’être déclaré inapte si l’on évoque une fragilité », illustre une étudiante. Dans ce contexte, un quart des répondants déclare souffrir d’une pathologie chronique et un quart consomme des médicaments au quotidien. 

Quant au sommeil, les ESI sont très loin des recommandations sanitaires, qui sont de 7 à 9 heures de sommeil par nuit. La moitié d’entre eux (48%) dort entre 5 et 6 heures par nuit et 10% dorment moins de 5h. Côté alimentation, 44% des sondés jugent leur qualité d’alimentation moyenne et 22% déclarent ne pas être rassasiés, en raison de contraintes financières ou des horaires de formation et de stage. Une situation qui reflète la précarité de ce public. 

Défis financiers de taille pour les étudiants en soins infirmiers

  • 65% des étudiants ont des difficultés financières et 49% jugent leurs ressources insuffisantes
  • Avec une indemnité de stage s’élevant entre 36 et 60 euros par semaine, soit un euro de l’heure en première année, 72% des ESI travaillent en parallèle de leurs études, contre 58% en 2022 et 40% en 2020. 

Sur le plan sportif, enfin, 47% des ESI ne pratiquent aucune activité sportive régulière, souvent par manque de temps. Un point positif est néanmoins mis en avant dans l’enquête : la consommation de tabac diminue ; 17% d’étudiants en soins infirmiers sont des fumeurs quotidiens en 2024, contre 29% en 2008. 

Les pensées suicidaires en hausse

L’enquête se penche enfin sur la santé mentale des ESI. Là encore, les indicateurs se dégradent de façon inquiétante. 27% d’entre eux ont eu des pensées suicidaires au cours de leurs études, contre 16,4% en 2022 et 7,4% en 2017. Un chiffre alarmant que les étudiants expliquent par : 

  • Des difficultés professionnelles (76%) : les étudiants rapportent notamment des situations « d’humiliation » et de « violences psychologiques fréquentes » durant les stages ; 
  • Des difficultés institutionnelles (60%)
  • Des difficultés personnelles (40%)

Parmi les étudiants ayant eu des pensées suicidaires cette année, 81% rapportent avoir subi des violences durant leurs études ou leurs stages, alerte encore le rapport. Des violences la plupart du temps psychiques (39%), mais aussi physiques (3,6%) et sexistes et sexuelles (2,6%), qui touchent autant les hommes que les femmes. Celles-ci traduisent, selon les auteurs, un phénomène de violence « systémique au sein de la formation ».

Capture d'écran de l'étude sur les conditions de formation des ESI. © Association SPS (soins aux Professionnels de santé) et « Réussis ton IFSI »

Une situation qui favorise forcément l’isolement social de ces étudiants, sentiment partagé par la moitié d’entre eux (53%). D’autant que cette solitude est « aggravée par un manque d’information des services de santé mentale : 61% des étudiants ne savent pas où trouver une aide psychologique. Les étudiants s’appuient principalement sur leur famille (85%) et leurs amis (76%) pour trouver du soutien. Seulement 0,7% des étudiants ont recours aux services de soutien de l’établissement », rapporte l’enquête. 

Cet état des lieux critique des ESI pousse les associations autrices de l’enquête à appeler à agir. Celles-ci proposent plusieurs pistes : mentorat et soutien par les pairs, ateliers anti-épuisement, gestion du stress ou encore conseils sur la santé physique et les habitudes de vie. Un accompagnement qu’elles mettent d’ores et déjà en place via des webinaires, ateliers gratuits ou encore groupes de parole. «L’instauration rapide d’interventions adéquates s’impose afin d’améliorer l’accès aux aides financières et offrir un soutien psychologique accru», plaident les associations. 

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