Alors que le monde de l’enseignement supérieur est en plein bouleversement – notamment dû à la baisse des crédits de l’État -, Patrick Hetzel vient d’arriver à la tête du ministère jusqu’ici occupé par Sylvie Retailleau. Diplomeo revient sur le parcours politique de celui qui hérite du Pavillon Boncourt, un ministère empli de défis pour la fin du deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron.
Un connaisseur du supérieur
Le monde de l’enseignement supérieur n’est pas inconnu pour Patrick Hetzel. En tant qu’étudiant, il obtient un diplôme en sciences de gestion à l’EM Strasbourg, à l’époque alors appelée IECS, avant de réaliser un doctorat dans la même discipline, au sein de l’Université Jean-Moulin-Lyon-III. Il commence sa carrière dans cet univers, en tant que professeur à l’Université de Strasbourg, de Lyon III, puis à Paris-Panthéon-Assas dès 1999.
Au sein de cet établissement, Patrick Hetzel va même fonder et diriger un laboratoire de recherche, le LARGEPA, ce qui donnera naissance au programme doctoral en sciences de gestion de l’Université Paris-Panthéon-Assas. En parallèle, il est nommé responsable du service des études de défense au sein de l’IHEDN (Institut des hautes études de défense nationale) jusqu’en 2004.
Les premiers pas en politique de Patrick Hetzel
C’est en 2007 que Patrick Hetzel place son expertise du monde de l’enseignement supérieur au service du gouvernement, en tant que conseiller éducation, enseignement supérieur et recherche de François Fillon. Une mission qu’il va exercer pendant un an seulement.
En parallèle, il rejoint le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en tant que directeur général pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle. Il va lancer un projet très controversé parmi la population étudiante et enseignante : la loi pour l’autonomie des universités. Un texte qui modifie en profondeur ces établissements : gouvernance, appel à des fonds privés, propriété des bâtiments universitaires, recrutement des professeurs…
Dès 2012, il affirme son engagement politique pour l’UMP, qui deviendra LR (Les Républicains), et se présente aux élections législatives pour représenter la 7e circonscription du Bas-Rhin, à proximité de Strasbourg. Il fait alors son entrée à l’Assemblée nationale en tant que député LR, une fonction qu’il va exercer jusqu’au 23 septembre 2024, date officielle de son entrée au gouvernement.
Les chantiers qui attendent le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur
Désormais aux commandes de ce ministère, Patrick Hetzel va devoir traiter plusieurs dossiers brûlants. Le premier est la plateforme Parcoursup. Les Républicains avaient exprimé, en 2023, plusieurs critiques sur ce site d’accès au supérieur, notamment sur la détresse des étudiants sur liste d’attente. Sera-t-elle remplacée ou réformée ? Pour l’heure, aucun projet sur ce sujet n’a été évoqué. Pour autant, une refonte, voire une suppression, de Parcoursup est attendue par de nombreux étudiants. Patrick Hetzel avait d'ailleurs soumis une proposition de résolution pour la création d’une commission d’enquête sur la transparence des critères de sélection de Parcoursup.
Autre sujet important pour le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) : le budget des universités. En quelques mois, les établissements ont observé une baisse des crédits de l’État à hauteur de 1,4 milliard d’euros. Conséquences : de nombreuses institutions sont aujourd’hui déficitaires et plusieurs filières pourraient fermer leurs portes, alors même que les étudiants expriment déjà leur difficulté à trouver une place dans le supérieur.
Patrick Hetzel ajoute également une corde à l’arc du MESR : l’intelligence artificielle. En effet, rattachée à ce ministère, Clara Chappaz aura la charge de tout ce qui touche à l’IA et au numérique. Celle qui a piloté le label French Tech pendant 3 ans devra travailler avec les chercheurs français pour satisfaire les ambitions d’Emmanuel Macron : faire de la France une nation pionnière dans l’univers de l’intelligence artificielle.
Patrick Hetzel : un ministre controversé
Aujourd’hui, Patrick Hetzel doit représenter l’enseignement supérieur, composé d’établissements pour lesquels l’ouverture vers le monde et les autres est au cœur de leur ADN. Pour autant, ce mantra n’a pas toujours guidé le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Dès 2013, il affichait son opposition au Mariage pour Tous, manifestant dans les rues aux côtés de personnalités comme Bruno Retailleau, désormais ministre de l’Intérieur, ou Virginie Tellenne, connue sous le nom de Frigide Barjot.
Membre du comité « L'entente parlementaire pour la famille », Patrick Hetzel a également marqué les esprits par ses prises de position contre la procréation médicalement assistée pour les femmes seules ou l’euthanasie. Il s’est également exprimé contre l’allongement du délai légal permettant aux femmes d’avorter.
Patrick Hetzel n’a pas toujours été un fervent défenseur de la communauté scientifique. Alors que les professionnels de santé fustigeaient les affirmations de Didier Raoult à propos de l’hydroxychloroquine, le nouveau ministre de l’Enseignement supérieur avait publiquement apporté son soutien au médecin marseillais. Il ira même jusqu’à écrire à Emmanuel Macron pour qu’il autorise temporairement l’utilisation de cette substance pour soigner les patients atteints de COVID-19.
Enfin, Patrick Hetzel est également connu pour avoir déposé une proposition de résolution pour la création d'une "commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur". Un acte qui témoigne du conservatisme du nouveau ministre et inquiète la communauté éducative dans l'enseignement supérieur.