Mercredi, 10h. Le groupe de cheerleaders s’élance sur la scène de l’amphi principal. Un dernier saut périlleux vient clôturer le show devant le public du jour : quatre rangées de jeunes en costume qui tentent, tant bien que mal, de se dérider. Autour d’eux, une équipe d’étudiants déchaînés, reconnaissables à leurs t-shirts floqués aux couleurs de leur école.
Théâtre, fanfare, manucure, matchs de foot… Tous les jours depuis maintenant 3 semaines, les admisseurs de NEOMA Business School sont à fond pour mettre à l’aise les admissibles et leur donner un aperçu de la vie du campus à Reims. Après deux ou trois ans de prépa, ces derniers ont été retenus aux concours écrits de l’école et s’apprêtent à passer leurs entretiens de personnalité. Ils ont 20 minutes pour convaincre leur jury qu’ils sont faits pour NEOMA BS.
Pour choisir ses futures recrues, l’école va chercher à "comprendre la motivation des candidats et leur personnalité" indique Imen Mejri, directrice du PGE de NEOMA. Le temps d’une journée, Diplomeo s’est invité dans un jury d’entretien de personnalité. Une immersion pour révéler les coulisses de cet exercice sélectif et codifié, qui peut en impressionner plus d’un.
Creuser la personnalité des candidats
Chez NEOMA BS, comme dans la plupart des écoles de commerce, les jurys sont composés de 2 ou 3 personnes. Généralement, il y a un prof permanent de l'école et un professionnel, qui peut être un alumni. On tombe dans le jury de Camille Briard, ancienne élève de NEOMA et aujourd’hui intervenante dans l’école en développement personnel et d’Hervé Parsy, ex-chef d’entreprise et prof de management et relations commerciales. Les deux se connaissent bien et se font un plaisir de découvrir leurs futurs élèves ensemble.
"On va regarder si le candidat sait où il va, comment il construit sa réflexion et s’il connaît un minimum l’école. Ce n’est pas grave s’il n’a pas un projet pro déjà ficelé", Camille Briard, jurée NEOMA
Face au premier candidat, ils rappellent brièvement le déroulé de l’entretien : une première partie de présentation, suivie des questions du jury. "Vous aurez un moment pour revenir sur certains points ou poser quelques questions à la fin de l’entretien”, précise Hervé Parsy au jeune homme. Sous les yeux du jury, le questionnaire préalablement rempli par l’étudiant, qui renseigne ses centres d’intérêts, son projet pro ou ses voyages. Une trame importante à bien remplir, pour orienter l’échange sur un sujet en particulier, comme la géopolitique ou le sport par exemple.
"L’idée n’est pas d’évaluer les connaissances de l’élève, mais plutôt de creuser sa personnalité et de comprendre sa motivation", explique Camille Briard à la fin des 20 minutes d’entretien. "On va regarder si le candidat sait où il va, comment il construit sa réflexion et s’il connaît un minimum l’école ; ce n’est pas grave s’il n’a pas un projet pro déjà ficelé ou qu’il ne connaît pas notre brochure par cœur", précise-t-elle. L'enseignante préfère en effet une réponse "bien construite et honnête" plutôt que d’entendre un projet pro bateau.
❌ L’erreur à ne SURTOUT pas faire en entretien "Le pire est de s’inventer un parcours, une vie. Il faut être soi-même, parler des choses importantes pour soi et montrer vraiment sa personnalité", insiste Imen Mejri, directrice du PGE de NEOMA. Attention toutefois à ne pas trop prendre ses aises, il faut savoir doser et rester dans son rôle ! |
Un enjeu pour les candidats et l’école à l’heure des transitions
"On n’est pas là pour coincer les élèves"
La deuxième étudiante retient l’attention des deux profs : "son discours n’était pas très construit, mais beaucoup plus naturel, même s’il y avait des fragilités", apprécie Hervé Parsy. Ce dernier a pour habitude d’interrompre les présentations récitées par cœur. "Je les arrête tout de suite : ça peut les déstabiliser, mais ça les oblige à faire les choses autrement, plus naturellement", explique-t-il.
La candidate en question n’a d’ailleurs pas hésité à jouer le jeu quand le jury lui a demandé de se mettre à la place de sa grande sœur pour se décrire. Un entrain et une créativité très appréciés de ses interlocuteurs. "On n’est pas là pour coincer les élèves", rappelle Camille Briard, qui regrette la croyance selon laquelle le jury est là pour "faire pleurer les gens". Au contraire, elle s’attache à "casser l’image de l’oral stressant : ça crée un échange plus humain avec les candidats. Et ce n'est pas en les mettant en position inconfortable qu’on les connaîtra !"
Ces derniers peuvent toutefois se mettre des bâtons dans les roues. "Il y en a qui se coincent tout seuls, en utilisant des termes négatifs ou qui manquent de conviction, comme ‘pas très motivé’, ‘j’ai un peu envie’..." averti la prof de développement personnel.
👮 Good cop ou Bad cop : mythe ou réalité ? Pour Imen Mejri, directrice du programme grande école (PGE) de NEOMA, il n’y pas de gentil et de méchant dans un jury. "Des fois, ils sont tous les deux gentils ; des fois on challenge un peu plus les candidats. Dans tous les cas ils restent bienveillants, car ils ne sont pas là pour stresser les candidats mais plutôt pour apercevoir le meilleur d’eux et de comprendre leur motivation". |
Une grille d’appréciation pour pondérer la note finale
Entre chaque candidat, le jury n’a que quelques minutes pour délibérer."On ne donne pas de note. On a une grille d’appréciation : relation avec le jury, présentation, expression, ouverture, relation à l’environnement… Et on coche différentes échelles : insuffisant, moyen, bon, très bon et exceptionnel", explique Camille Briard.
"Exceptionnel c’est vraiment quand un candidat nous captive tout du long", Hervé Parsy, juré NEOMA
"Exceptionnel c’est vraiment quand un candidat nous captive tout du long", glisse Hervé Parsy. Dans l’après-midi, un seul d’entre eux a obtenu "excellent" partout : "il n’a pas de projet professionnel, mais il compte sur l’école et les stages pour se découvrir ; il nous a répondu finement et franchement et il a complètement relancé l’entretien. À la fin, il m’a même mouché !", s’amuse le prof de management.
Les mauvaises appréciations, quant à elles, sont plutôt rares - il n’y en aura aucune en dessous de "bon" dans l’après-midi - et doivent être justifiées à l’écrit par le jury. Pour Camille Briard, ce qui peut pénaliser un étudiant est son manque de savoir-vivre : "arriver en retard, avec une tenue peu soignée, sans avoir envoyé son questionnaire, ça passe mal", selon elle. "On reste une institution : si on aime les fortes personnalités, il faut qu’elles respectent le cadre et les valeurs de notre école", ajoute-t-elle.
🤝 Bien gérer la fin de son entretien de personnalité À la fin de ton entretien, n’hésite pas à interroger le jury sur son parcours et son expérience en lien avec l’école. C’est un vrai plus, apprécié des jurés, qui montre l’intérêt du candidat et sa capacité à rebondir ! |
La note finale de l’oral sera déterminée plus tard, par d’autres correcteurs. Ils utiliseront la grille d’appréciation pour pondérer la note finale, selon les parcours (CPGE littéraire ou économique et commerciale). Les étudiants devront attendre le 4 juillet pour connaître leurs résultats d’admissions. Sur les quelque 4000 candidats aux épreuves orales cette année, seuls 780 pourront décrocher une place sur l’un des deux campus de Neoma, à Reims ou à Rouen.