Bizutage : 4 questions sur une dérive interdite qui perdure

Le bizutage est un délit puni par la loi. Pourtant, cette pratique, défendue à tort comme une tradition d’intégration, se perpétue dans l’enseignement supérieur. Comment la prévenir ? Comment réagir en cas de bizutage ? Quelles sont les sanctions ? Diplomeo fait le point.
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Encore considéré - à tort - comme un rite d’intégration dans certaines grandes écoles ou prépas, le bizutage est pourtant interdit et puni par la loi. Si la parole des étudiants s’est libérée ces dernières années sur cette pratique souvent présentée comme une tradition, elle n’a pour autant pas disparu des weekends ou soirées d’intégration.

Durant ces événements, certains étudiants peuvent être amenés à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants, avec ou sans consentement, dans un but d’intégration. Dans ce cas, c’est bien du bizutage dont ils sont victimes. Quelle est cette pratique et comment est-elle encadrée par la loi ? Comment réagir en cas de bizutage ? Diplomeo fait le point.

Qu’est ce que le bizutage ?

Le bizutage est un délit puni par la loi de 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs. Celle-ci définit le bizutage comme "le fait pour une personne d'amener autrui contre son gré ou non à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants lors de manifestations ou de réunions liées aux milieux scolaire et socio-éducatif".

Cette pratique est exercée le plus souvent par des étudiants sur de nouveaux arrivants. Les anciens profitent de leur supériorité pour imposer aux nouveaux des épreuves de toute nature, "auxquelles ils ne pourront se soustraire sous l’emprise de la pression du groupe", s’exposant à "ce que l’on peut appeler des sanctions en cas de refus, comme l'interdiction d’accès à divers avantages de l’école" détaille le Comité national contre le bizutage (CNCB) sur son site.

Le bizutage peut prendre de nombreuses formes, comme pousser à la consommation excessive d’alcool, à hurler sur une personne, à simuler des actes sexuels, à chanter des chansons obscènes, égrène encore le CNBC. L'association soulignait dans la presse, en septembre 2023, que les violences sexistes et sexuelles sont le pilier du bizutage en France.

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Comment savoir si je suis victime de bizutage ?

Trois étapes sont caractéristiques du bizutage, selon le CNCB :

  • La prise en main : l’aîné signifie au nouveau que celui-ci est soumis à sa volonté, même s’il essaie de lui faire croire qu’il a le choix ;
  • La période de soumission : le nouvel élève acceptera tout ce que les anciens lui imposeront. Ces derniers ont les pleins pouvoir, ils vont en user et en abuser ;
  • La réconciliation : une fois l’épreuve passée, les nouveaux sont intégrés officiellement dans la communauté. Les nouveaux sont prêts à bizuter à leur tour l’année suivante.

Le bizutage peut "utiliser des techniques de manipulation mentale", comme la privation du sommeil, la perturbation de l’alimentation, "qui affaiblissement les nouveaux et les conduisent de manière insidieuse à accepter des choses qu’ils n’auraient pas acceptées en d’autres circonstances", analyse encore le CNBC.

Dans ce contexte, la question du consentement ne fait pas de différence dans la définition du bizutage. Si un élève est consentant à une épreuve - ou croit l’être - il reste victime de bizutage. "Il n’y a pas de gentil bizutage", insiste encore le CNBC, qui distingue cette pratique de l’accueil des étudiants. L'accueil consiste à se mettre au service d’un nouvel étudiant, à l'accepter dans sa différence. Au contraire, le bizutage consiste à utiliser l’expérience de l’ancien élève pour mépriser le nouveau et exercer sur lui un chantage à l’exclusion.

Que faire si je suis victime ou témoin de bizutage ?

Vous êtes confronté à un bizutage ? S’il n’est pas forcément facile d’oser parler - par peur des représailles - il n’est jamais trop tard pour agir, et dénoncer des abus. En cas de bizutage, vous pouvez donc porter plainte au commissariat ou à la gendarmerie de votre choix.

Alerter l’autorité administrative de l’école

Il faut également informer "sans délai" l’autorité administrative de l’établissement, précise le Service public sur son site. "Les responsables de l’établissement devront saisir le procureur de la République et engager des poursuites disciplinaires contre les auteurs et les personnels qui ont contribué au bizutage", poursuit l’organisme.

"Si vous décidez de parler, il est indispensable de donner les précisions suivantes : date, lieu, noms des personnes en cause, description des faits, photos et vidéos si possible" ajoute le CNBC. "Sans ces éléments, il vous sera difficile de vous faire entendre", insiste l’association, qui souligne qu’avec plusieurs voix, "c’est plus facile de dire non".

Pouvoir dire "non"

Certains signaux permettent d’identifier le bizutage en amont. "Ce qui doit alerter, c’est le silence, le manque d’information", explique le dispositif de prévention et de soutien Fil Santé jeune sur son site. "Si on vous demande par exemple de vous rendre à un lieu donné pour un weekend d’intégration, demandez à connaître le programme. Vérifiez que vous restez joignable et que vous pouvez communiquer en toutes circonstances", poursuit le site.

Il est possible de s’opposer à un bizutage, que l’on soit victime ou auteur. S’il n’est pas évident de s’affirmer face à un groupe de personnes "il n’y a pas de honte à refuser de suivre une consigne qui n’a pas de sens à vos yeux, qui vous semble dégradante, humiliante ou dangereuse", ajoute Fil santé jeune. "On essaiera peut-être de vous faire passer pour un lâche. En réalité, c’est bien une preuve de courage que de pouvoir affirmer une opinion personnelle, différente des autres", insiste le dispositif. Des conseils qui sont valables aussi bien pour les victimes que les bizuteurs.

Le CNBC, comme Fil Santé Jeunes et de nombreuses autres associations sont à l’écoute des victimes en cas de bizutage pour les accompagner dans leurs démarches et les soutenir psychologiquement. Libérer la parole est le premier cap à passer contre toutes formes de violences.

Quelles sanctions en cas de bizutage ?

Le bizutage est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende, selon le Code pénal. Ces peines sont doublées si l’infraction est commise sur une personne dont la particulière vulnérabilité (due à son âge, une maladie, une infirmité, une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse), est apparente ou connue de son auteur, précise la loi.

A noter que les actes de violence, de menaces ou d’atteintes sexuelles sont des infractions distinguées du bizutage. Elles sont punies par des amendes ou des peines d’emprisonnement, allant jusqu’à 10 ans.

Si une personne morale (école, centre sportif, association) est reconnue coupable de bizutage, elle risque une amende de 37 500 euros ainsi que la fermeture des locaux où les faits se sont produits.

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