« Une des expériences les plus épanouissantes et professionnalisantes » de sa vie. C’est en ces termes que Charly, 28 ans, décrit son parcours en service civique. Après une licence en langues étrangères appliquées (LEA) et un master en médiation culturelle, le jeune homme s’interroge sur ses aspirations. Commence alors pour lui une longue traversée d’un tunnel truffé de doutes. Au bout, Charly trouve la voie du Service Civique Solidarité Seniors (SC2S).
À hauteur de 28 heures par semaine, pendant 8 mois, le jeune homme a alors l’occasion de mettre ses compétences au service du « bien vieillir ». Du lundi au jeudi, au sein d’une association et contre une rémunération mensuelle d’environ 600 euros, il entreprend plusieurs actions pour lutter contre l’isolement des personnes âgées.
Aujourd’hui, Charly est ambassadeur national du SC2S. Un moyen pour lui de « rendre » à ce dispositif tout ce qu’il lui a apporté et de faire savoir aux jeunes âgés de 16 à 25 ans — jusqu’à 30 ans en situation de handicap — qu’il y a des moyens autres que l’école ou le travail pour gagner en compétences et se faire un peu d’argent.
Dans quel contexte as-tu effectué ton service civique ?
J’ai réalisé mon service civique entre 2022 et 2023. J’avais 25 ans, donc pile-poil l’âge limite pour me lancer. J’avais déjà obtenu une licence en LEA, puis un master en médiation culturelle, mais je vivais un moment introspectif assez compliqué. Je me cherchais.
En faisant le bilan de mes aspirations, je me suis rendu compte que le fil rouge de mon parcours, c’était le social : accompagner, transmettre, aider. J’ai alors voulu trouver une expérience qui me permettrait d’explorer cette voie, sans pour autant avoir à reprendre mes études. C’est à ce moment que j’ai trouvé le dispositif du Service Civique Solidarité Seniors. Il est arrivé à point nommé avec mon désir de découvrir l’univers du social !
Comment as-tu entendu parler du service civique ?
J’ai entendu parler du dispositif il y a 5 ans. Une amie en avait effectué un, au sein d’une école primaire, à Nantes. Elle encadrait des ateliers théâtre. J’avais trouvé cela assez incroyable de pouvoir apprendre par l’action. Parfois, dans les études, l’approche par le concret peut manquer, au profit de l’aspect théorique. Ma curiosité pour le service civique avait donc déjà été éveillée à cette époque.
Ensuite, pour intégrer le Service Civique Solidarité Seniors, j’ai simplement tapé « service civique » et le nom de ma ville, « Royan », sur internet. Je suis tombé sur le site officiel du dispositif et les annonces. Je me suis orienté vers le SC2S, car il y avait beaucoup de missions en lien avec le social sur la fiche de mission.
Le processus a été super rapide ! J’ai été appelé par le tuteur de l’association dans laquelle j’ai postulé, le jour même. Il m’a tout expliqué. J’ai eu l’entretien le lendemain et j’ai pu commencer une semaine après.
Avais-tu déjà eu l’occasion de passer du temps avec des personnes âgées avant de t’engager ?
J’ai toujours eu un lien très fort avec mes grands-parents. Aussi, juste après mon master, j’avais cette idée qui me trottait dans la tête de mêler les populations et les générations au sein d’un tiers-lieu. C’était un projet que j’avais avec un ami, à la fois à visée culturelle, en lien avec mes études, mais également à visée intergénérationnelle.
« On n’est pas lâché dans la nature ! » Charly, ancien volontaire et ambassadeur du Service Civique Solidarité Seniors (SC2S)
Après m’être engagé au sein du Service Civique Solidarité Seniors, j’ai pu bénéficier de formations. Il y a un cycle de formation obligatoire pour tous les volontaires. On aborde l’écoute active, les différentes façons d’accompagner un senior ou encore les métiers en lien avec le grand âge. On n’est pas lâché dans la nature ! D’ailleurs, on travaille toujours enduo, avec un autre jeune. Je suis devenu très ami avec mon binôme, Clément !
Peux-tu nous décrire tes missions au sein du SC2S ?
La mission principale consistait à lutter contre l’isolement des seniors. Cela peut prendre énormément de formes différentes, en fonction de la structure d’accueil et de la ville. Par exemple, on effectuait des « visites de convivialité » : on allait visiter des seniors à domicile. On faisait aussi des activités et des sorties culturelles ou alors, on discutait autour d’un café, avec eux. Il y avait également des ateliers en lien avec la rupture numérique, pour réconcilier les seniors avec ce médium du quotidien.
« Le service civique, ce n’est pas l’école, ce n’est pas un travail non plus : c’est du volontariat. En d’autres termes, on n’a pas d’obligation de résultat ! »
Pour résumer, le Service Civique Solidarité Seniors, c’est de l’accompagnement social, mais toujours dans le cadre de la convivialité. Les seniors dans le besoin sont identifiés grâce à des partenariats entre l’association et les tissus associatifs et municipaux de la ville.
D’après toi, quels sont les points forts d’une telle expérience ?
Le service civique, ce n’est pas l’école, ce n’est pas un travail non plus : c’est du volontariat. En d’autres termes, on n’a pas d’obligation de résultat ! Cet aspect libère d’une certaine pression, mais en même temps, la structure et les tuteurs nous encouragent àproposer des choses. Par exemple, je suis passionné de photographie et d’arts visuels, alors j’ai eu l’opportunité d’organiser des shootings avec des seniors, en partenariat avec une autre association.
« Je pense qu’un service civique, c’est ce qu’on en fait. »
Je pense qu’un service civique, c’est ce qu’on en fait : c’est une expérience flexible et malléable. En tout cas, au sein du SC2S, il est tout à fait envisageable de se limiter aux missions proposées et de progresser tout de même. Par contre, si on a envie de proposer des chosesen lienavec nos appétences et passions, c’est complètement possible aussi et c’est génial ! Ça change de certaines expériences professionnelles dans lesquelles on peut être bridé, car on débute.
Et quelles en sont les exigences ?
La seule exigence, c’est la motivation. Il n’y a pas de prérequis de diplôme ou d’expérience professionnelle. C’est la motivation qui fait la différence, ainsi que l’ouverture d’esprit. À titre d’exemple, mon binôme, Clément, n’avait pas le niveau bac.
Que t’as apporté cette expérience personnellement ?
Mon expérience au sein du service civique solidarité seniors m’a surtout apporté de la confiance en moi. Je sortais d’une période de doutes, très compliquée mentalement.
« J’ai vraiment vu un avant et après service civique. »
Durant mes 8 mois de volontariat, on m’a fait confiance, j’ai réalisé des actions concrètes et je me suis senti utile. J’ai appris à trouver ma place au sein d’un groupe et je me suis découvert une capacité de leadership. Évidemment, j’ai aussi développé des compétences sociales et de savoir-être, mais pas seulement. J’ai aussi acquis des compétences rédactionnelles, car j’ai été amené à écrire des articles sur les actions qu’on menait. Des compétences graphiques également, en réalisant des flyers, par exemple.
« Ça a débroussaillé mon fouillis intérieur et j’ai pu trouver ma voie. »
Ça a été un déclic professionnel et personnel, en plus d’un tremplin citoyen incroyable ! Ça a débroussaillé mon fouillis intérieur et j’ai pu trouver ma voie. Je compte entamer des études de psychologie et c’est en grande partie grâce à mon expérience en Service Civique Solidarité Seniors. D’ailleurs, il faut savoir qu’en plus des formations propres aux missions d’accompagnement des seniors, les tuteurs travaillent avec les jeunes leurs projets d’avenir. Ensemble, on prépare l’après service civique.
As-tu quelques anecdotes en tête ?
Il y a des tas de moments inoubliables ! Je pense, par exemple, à une expérience avec une association partenaire. Il s’agissait d’un podcast autour des récits de vie de personnes âgées. Dans ce cadre, j’ai interrogé une femme, Colette, sur six séances. On a retracé sa vie et c’était super intéressant !
« Je ne l’avais pas entendu rire depuis si longtemps ! » Charly se rappelle certains témoignages des familles des seniors accompagnés.
Je me souviens aussi d’un débat organisé autour de la langue française. Pendant ces séances, les seniors nous apprenaient les expressions phares de leur jeunesse, et à notre tour, on les mettait à la page quant aux nôtres. J’ai aussi entendu des paroles touchantes de la part des familles comme : « Je ne l’avais pas entendu rire depuis si longtemps ! » ou de la part de certains seniors comme : « Je n’ai pas envie de faire quoique ce soit en particulier, pouvoir parler avec vous c’est déjà beaucoup. »
Le mot de la fin ?
Je pense que le dispositif du service civique peut contribuer à faire bouger les choses. Par exemple, le SC2S change la vision des jeunes sur plein d’aspects : le monde du travail et les seniors. Il change aussi la vision des partenaires et des structures sur les jeunes et finalement, tout le monde évolue pour le mieux.