Constructeur le jour, musicien et interprète la nuit. À 26 ans, Antoine Lorenzon endosse la double casquette d’artiste et d’ingénieur en rénovation énergétique et dans le bâtiment chez agap2, acteur européen du conseil en ingénierie et des services numériques, depuis plusieurs années maintenant.
Baccalauréat en poche à l’âge de 15 ans, diplômé d’école d’ingénieurs de l’École de Mines de Nantes à 21 ans, Antoine Lorenzon s’est intégré rapidement dans la vie active. Un atout qui lui a permis de prendre ses marques plus aisément et de ne pas se mettre la pression pour appréhender le monde professionnel.
S’il exerce en rénovation énergétique, il est aussi à ses heures perdues, artiste et compositeur sous le nom de Lhody. Il compose lui-même ses mélodies, chante et se produit sur scène, dans les petits villages comme les festivals. Une double vocation qui n’est pas de tout repos, mais qui lui apporte une satisfaction inégalée. Focus sur ce jeune ingénieur au parcours atypique.
Pourquoi avoir choisi de devenir ingénieur-constructeur ? Quelles sont tes missions au quotidien ?
Globalement, au quotidien avec agap2, je pilote des chantiers de rénovation thermique pour le département de la Haute-Savoie. Ils ont des collèges, des lycées, des conservatoires, des choses à rénover qui sont vraiment, pour la plupart, de vieux bâtiments. Et avec l’argent qui est dédié, on essaie de rénover en faisant ce qu’il y a de plus logique. Pour ce faire, je m’entoure d’ingénieurs d’études. Je m’occupe de la planification et finance ensuite le suivi des entreprises sur le terrain, ainsi que la finalisation. L’équipe est composée de personnes très compétentes. Je suis en CDI depuis 4 ans en tant que consultant. Parfois, il y a des périodes de flottement entre 2 missions, car ça ne colle pas toujours à une semaine près et c’est normal.
Ce que j’apprécie chez agap2, c’est de pouvoir vraiment changer de projet très régulièrement, auquel cas je m’ennuierais vite. C’est pour ça que j’ai signé chez eux et que j’ai développé plusieurs projets sympas. C’est concret, j’apprends des choses pour moi-même. D’ailleurs, je ne vais pas tarder à construire ma maison ; je commence à faire des plans et je suis très intéressé par tout ce qui est optimisation.
Tu as réalisé ton stage de fin d’études en Nouvelle-Calédonie dans une entreprise spécialisée dans l’urbanisme et le bâtiment durable. Qu’est-ce que tu retiens de cette expérience ?
Cela s’est un peu fait sur un coup de tête. Une fille de mon école avait suggéré une offre de stage en Nouvelle-Calédonie et comme c’était pile ce qu’il me fallait, j’ai postulé. C’était une expérience très enrichissante : j’y ai fait des choses que je ne pourrais pas faire ailleurs. Les paysages et la culture étaient impressionnants. Lors de mon stage, je me suis très bien intégré. Le boulot, c’était super intéressant : les projets étaient bons, je me faisais plaisir. Le rythme et le cadre de vie, rien à dire. Puis, la musique m’a aussi aidé à m’intégrer sur place : j’ai fait de premiers castings pour The Voice France et ça m’a permis de rencontrer des gens incroyables. On passait nos soirées à chanter tous les soirs, dans les bars, des karaokés, à la plage, etc.
En Nouvelle-Calédonie, j’ai fait des rencontres qui marquent à vie grâce à ma double casquette de musicien et d’ingénieur. Le stage en ingénierie m’a permis à la fois de m’épanouir dans mon travail et dans la musique, tout est lié. Je n’ai qu’une hâte, c’est d’y retourner pour des vacances.
Tu es auteur, compositeur et interprète en parallèle de ton métier d’ingénieur, sous le nom de Lhody. Comment endosses-tu ta carrière d’artiste et de scientifique au quotidien ?
Ce n’est pas toujours simple. L’avantage dans ma carrière d’ingénieur, c’est que je suis chargé d’affaires. J’organise plus ou moins les réunions, c’est moi qui gère le temps, donc si j’ai envie de bosser davantage à tel moment ou ne pas être dispo à un autre moment, je peux aussi. J’utilise ces moments de creux pour démarcher des bars, des restaurants et des festivals. On est sollicités sur tellement de points. Je n’imaginais pas la facette que ça pouvait avoir d’être musicien semi-professionnel, cela démarre à peine et il y a déjà beaucoup d’éléments à gérer.
Je travaille avec ma petite amie qui est musicienne, elle joue de la guitare, du piano, et produit de la musique par ordinateur. Elle m’assiste sur le démarchage, la tournée, la communication, les réseaux sociaux, etc. Grâce aux missions d’ingénieurs que je peux moduler à ma guise, c’est assez adaptable.
Qu’est-ce qui t’a poussé à chanter et composer des musiques ? Travailles-tu avec un label en particulier ?
Je pousse la chansonnette depuis que je suis enfant. À l’âge de 6 ans, on me faisait chanter aux fêtes des voisins et aux repas de famille. C’était amusant, tout le monde appréciait. À l’adolescence, je me suis mis à l’écriture, j’ai donc sorti un premier livre de poésie.
À l’époque, j’écrivais beaucoup de romans et de poésies qui n’ont jamais vu le jour. Mes poèmes étaient musicaux, ça me donnait envie de fredonner un petit air dessus. Résultat : l’appel de la musique est revenu tout seul.
Est-ce que tu produis régulièrement ? Quelle a été ta dernière expérience ?
Ma dernière expérience dans la musique, c’est la tournée. On a fait une tournée de 30 dates entre juin et septembre 2022 : des bars, des petits restos, des v&b, des fêtes de villages dans le sud-ouest, près du canal du Midi et un événement intitulé le Festival de la terre, avec un public de 300 à 400 personnes. Ce n’était pas énorme, ça m’a permis de tester si on pouvait en vivre à deux. Et on a vu que pendant 4-5 mois, c’était possible. Comme pour les artistes professionnels, on a effectué une tournée en van et ça s’est très bien déroulé.
J’ai dû jongler avec mon emploi d’ingénieur. Souvent on prenait la voiture, jusqu’à Saint-Malo, à Pornic, dans le sud-ouest, puis partout en France. Parfois, c’était 12 h de route, donc je faisais mes réunions en télétravail dans la voiture. On installe le matériel, on chante, avec des shows jusqu’à minuit, puis on est exténués et le lendemain ça recommence. Néanmoins, j’en garde des souvenirs exceptionnels.
Tu as monté un partenariat avec une association, l’Enfant bleu, qui lutte contre la maltraitance des enfants. Est-ce que tu peux me dire quelques mots sur cette asso ?
L’Enfant bleu est une asso qui vient en aide aux jeunes enfants et les accompagne de A à Z. En premier lieu, ils visent à augmenter le nombre de signalements, car il y a pas mal d’enfants victimes qui ne parlent pas, qui n’osent pas ou qui ne savent pas que c’est déplacé ou mauvais. Cela se traduit parfois par une mise à l’écart de la famille, vu qu’à l’âge de 8 ans on ne peut partir de chez soi comme ça. L’asso prend en charge les frais de nourriture, d’hébergement et d’accompagnement psychologique. Le public concerné est composé d’enfants directement dans cette situation, mais aussi d’anciennes victimes qui ont 50 ans aujourd’hui. Il y a aussi un accompagnement juridique : à cet âge-là, confronter son père sans être soutenu par le système judiciaire ou un professionnel, fait que l’on peut s’écraser. Ils interviennent sur tous les fronts : violences physiques, morales, psychologiques, sexuelles, etc.
Le partenariat s’est fait pendant le premier confinement où je travaillais sur des covers. J’avais entendu parler de cette asso et je me suis demandé avec d’autres jeunes artistes sur Instagram si l’on pouvait faire des mini concerts avec eux, afin de mutualiser toutes les communautés. J’ai donc contacté l’association qui était hésitante au début et qui a fini par accepter. On a fait un premier live qui a vraiment bien marché. On a finalement réalisé 4 séries de lives en 3 ans. Et puis, à chaque fois, il y avait un public connu : des acteurs de Scènes de ménages ou encore Mohamed Bouafsi, journaliste sur France 5 et RMC Sport. Cela nous a donné confiance de voir que ça fonctionnait. On a récolté pas mal de fonds, autour de 5000 euros.
Arrives-tu malgré toutes ces activités à trouver du temps libre pour toi ?
Souvent, quand l’hiver arrive à grands pas, j’essaie de partir d’ici. En novembre, je me suis envolé au Mexique pendant un mois : sans téléphone, ni réseaux sociaux, ni musique. Sinon au quotidien, il y a pas mal de choses qui me détendent. J’aime bricoler des trucs, jouer aux jeux vidéo, aller au restaurant et faire des randonnées.
Quels sont tes projets dans les mois et les années à venir ?
Pour les prochains mois à venir, je vais poursuivre ma double-casquette d’ingénieur et de musicien qui me correspond très bien. On prépare la tournée avec ma partenaire et on s’est décidé, pour garder le rythme, de faire 2-3 concerts par mois : le prochain, ce sera au Nouvel An à Deauville et après on a 2 concerts début janvier à Grenoble et à Annecy.
D’ici 2024, j’espère faire encore plus grand, des premières parties à l’Olympia, soyons fous (rires). Je ne m’interdis rien, j’aimerais trouver un label qui m’aide à trouver des contacts. Peut-être que ça va libérer des choses, le but étant de produire de façon plus qualitative en indépendant.
«Il ne faut surtout ne pas s’interdire de faire plusieurs choses à la fois, nous ne sommes pas dans une case ou un rôle», Antoine Lorenzon (Lhody)
Quel message donnerais-tu à des jeunes qui souhaiteraient, comme toi, avoir une vie qui concilie travail et passion ?
Savoir parler franchement. Il faut aussi déterminer ses limites : que ce soit dans le milieu de la musique ou de l’ingénierie, les gens ne comprennent pas forcément que tu as aussi une vie. Par exemple, Agap2 m’a permis d’être franc avec mon employeur et faire comprendre qu’à 18 h je devais m’en aller, car il faut que j’installe un concert. Ce n’est pas pratique, mais c’est le jeu.
Il faut s’entourer de personnes qui l’acceptent, ce qui n’est pas toujours facile. Ce n’est pas la peine de faire noyer le poisson, de prétendre que tu peux être partout en même temps. Il faut être honnête et ne pas hésiter à prévenir « je ne vais pas pouvoir, car j’ai autre chose à côté », plutôt que d’avoir à rater les deux à la fois.
Enfin, il faut aussi oser, se dire que ça peut marcher. Oser pour tout, pour les choses simples de la vie comme les autres projets. Et surtout ne pas s’interdire de faire plusieurs choses à la fois, nous ne sommes pas dans une case ou un rôle. Si vous avez envie d’essayer plusieurs choses en même temps, faites-le.