Aujourd’hui, l’écologie attire l’intérêt de plus en plus de jeunes. Si certains d’entre eux défilent dans les rues, d’autres s’engagent dans des associations dédiées à la protection de l’environnement, notamment sur leur campus. C’est le cas de Hugo Butery, aujourd’hui président de Symbioz, qui promeut le développement durable à l’école d’ingénieurs du numérique d’EFREI Paris. Interview.
Pour commencer, peux-tu nous parler de toi ?
Je suis étudiant en troisième année de section internationale, et actuellement en semestre d’immersion à Singapour. Je suis entré à EFREI Paris en post-bac. Je cherchais une école qui me permettrait d’entrer en école d’ingénieurs directement, sans avoir à passer par la prépa. Cela m’a permis de m’engager dans plusieurs associations étudiantes, dont Symbioz, et d’avoir à la clé une formation d’ingénieur.
Tu voulais déjà t’investir en association avant d’entrer à EFREI ?
Oui, les associations étudiantes ont été un très grand critère pour le choix de mon école. J’ai toujours été attentif à l’ambiance dans laquelle j’entrerais. L’important pour moi, c’était de pouvoir avoir une formation reconnue par l’État et des années lors desquelles je pourrais profiter un maximum de mes études. Je fais partie des étudiants qui se sont investis le plus rapidement : je suis dans 5 associations depuis ma première année et je ne les ai toujours pas quittées.
Faire partie de 5 associations étudiantes en même temps, ce n’est pas un rythme intense ?
Si, c’est beaucoup de travail, et quelquefois on s’emmêle les pinceaux. Comme j’ai eu des postes à responsabilité assez tôt, ça m’est tout à fait arrivé de faire des erreurs. Mais ça n’a jamais été très grave et j’ai beaucoup appris de tout ça. Et puis je suis à l’aise à l’école, donc ça se passe plutôt bien.
« Les espaces verts, ça choque quand on est habitué à vivre avec un grand jardin. On se retrouve avec un campus où il y a de la pelouse et quelques arbres. »
Qu'est-ce que Symbioz ?
Symbioz est l’association qui promeut le développement durable sur le campus de d'EFREI Paris. Nos action s se divisent en deux parties : la sensibilisation et l’action. En termes de sensibilisation, on se porte vraiment sur celle des étudiants. L’idée principale est d’avoir des futurs ingénieurs qui seront intéressés par les questions de développement durable et qui y seront sensibles dans leurs projets.
Pourquoi as-tu choisi cette association ?
Le développement durable a toujours été quelque chose qui m’intéresse beaucoup. Déjà parce je viens de Nantes, donc je suis confronté directement au changement d’ambiance entre la vie parisienne et la vie provinciale. C’est vrai que les espaces verts, ça choque quand on est habitué à vivre avec un grand jardin. On se retrouve avec un campus où il y a de la pelouse et quelques arbres. C’est quelque chose qui m’avait vraiment frappé. J’ai donc tout de suite eu le sentiment que ce genre d’association est nécessaire sur un campus comme celui d'EFREI Paris. Je fais aussi du scoutisme donc je suis très sensible à la protection de la nature. C’était évident qu’il fallait que je rejoigne Symbioz.
Peux-tu nous parler des actions que vous menez sur le campus ?
Nos projets passent beaucoup par l’événementiel. L’année dernière, nous avions installé un stand de vélo smoothie lors du week-end d’intégration. Nous avons aussi participé à la journée de la santé lors de laquelle nous nous sommes axés sur l’alimentation : manger sain, manger équilibré et bon pour la planète. Nous avons également fait un petit-déjeuner solidaire avec l’association Formation aux Particuliers (FAP).
Côté action, nous faisons appel à un primeur éthique à Villejuif, qui nous fournit nos paniers de fruits et légumes. Tous les mois ou tous les deux mois, nous organisons des ventes de paniers subventionnés par l’association, ce qui permet d’avoir des compositions autour de 10 euros, pour à peu près 4 à 5 kilos de légumes. Cela permet aux étudiants de manger des fruits et légumes bios français et pas chers. Symbioz publie aussi un magazine bimensuel : Ethique Mag.
Il y a des machines de tri sélectif sur le campus, mis en place par EFREI avec Human’IT, le fonds de dotation d’EFREI Paris. En y recyclant des bouteilles ou un gobelet, les étudiants peuvent avoir un jeton échangeable contre une place de cinéma. Là c’est Symbioz qui gère les échanges. Ça permet de motiver les étudiants à recycler.
Nous avons également organisé deux conférences et une projection-débat du film Après-Demain, en partenariat avec l’association ecocampus de l’ENS. Nous l’avons projeté sur le campus de l’École Normale Supérieure lors d’une séance gratuite. La coréalisatrice s’est déplacée pour animer le débat. Ça a très bien marché, la salle était pleine. C’était un bel événement.
En ce moment, on travaille de façon beaucoup plus étroite avec Human’IT. On a plusieurs projets d’apiculture urbaine sur le campus, sur les énergies renouvelables, éventuellement une installation de panneaux solaires ou des études sur la manière de réduire notre consommation... Actuellement, l’école est en train de faire beaucoup de travaux. Nous allons donc veiller à ce que l’administration conserve un maximum d’espaces verts. Il y a des discussions sur les différentes possibilités pour augmenter la biodiversité avec des murs végétaux ou des toits végétalisés. Tout ça c’est une grosse réflexion, car il faut prendre en compte que les murs végétaux ne sont pas forcément si écologiques qu’on le croit, que si on met des toits végétalisés, on ne peut pas installer de panneaux solaires, etc.
Est-ce que vous êtes écoutés par l’école et l’administration sur ce sujet ?
C’est difficile à dire pour l’instant, car le projet est en cours. Ils nous ont communiqué quelques briefs, donc nous savons à peu près à quoi vont ressembler les transformations. Mais pour l’instant, rien n’est défini ou acté. Il faut que nous arrivions à mettre notre grain de sel avant que tout soit bloqué définitivement et qu’ils aient fait leurs choix. Mais oui, l’école semble disposée à nous écouter. D’ailleurs ils sont tout à fait conscients que les espaces verts sont importants pour les EFREIens, et c’est même important pour eux que les étudiants adhèrentaussi au projet.
« Le numérique n’est pas tout propre et on a un rôle important à jouer en tant qu’ingénieurs. »
Les étudiants de d’EFREI sont-ils sensibles à vos actions ?
Oui, les événements qui se passent dans l’école ont généralement du succès. De toute façon, on se place toujours sur des espaces de passage, donc ça marche plutôt bien, notamment la nourriture ! On leur propose systématiquement des aliments biologiques et/ou locaux.
Vous organisez aussi des dégustations d’insectes...
Oui c’est une petite activité assez classique. C’est vrai que les étudiants ne réalisent pas l’état de la pollution de la production de viande. Et cette dégustation d’insectes, c’est quelque chose qu’on propose régulièrement pendant nos événements, au Forum des Associations ou pendant le Sustainable Day. On leur propose de les goûter sous différentes formes, ça peut être simplement grillés ou sous forme de tablettes de chocolat. C’est pour leur montrer que peut-être qu’un jour ils n’auront pas le choix et devront manger ça. Ça marche plutôt bien, et c’est toujours assez rigolo.
EFREI Paris est une école d’ingénieurs du numérique. Le numérique représente 7% de la consommation mondiale selon le rapport Clicking Clean. Est-ce que vous vous positionnez également sur ces sujets-là ?
Justement, pour Symbioz c’est très important d’avoir une action auprès des étudiants pour les y sensibiliser. Le but est qu’ils prennent en compte le développement durable dans leurs projets et leur entreprise.
Pour avoir une action un peu plus concrète, nous avons organisé l’année dernière avec Human’IT un événement qui s’appelle “How to Green’IT”. Le but est d’inviter les étudiants à participer à plusieurs ateliers liés à leurs projets transverses. Il y avait des sujets sur la consommation des échanges de données, du stockage de données, sur les calculs, etc. Au cours de ces ateliers, on les a aidés à avoir une idée concrète de l’impact de leur projet sur l’environnement. Cela nous a vraiment permis de leur montrer que le numérique n’est pas tout propre et qu’on a un rôle important à jouer en tant qu’ingénieurs.
Les membres de l’association participent-ils aux manifestations ou aux grèves pour le climat ?
Concernant l’association Symbioz, on ne s’engage pas politiquement, sur ma volonté personnelle. Par contre, dans l’association, il y a des membres qui sont actifs dans les marches pour le climat. Au sein de Symbioz, il y a des appels pour ceux qui ont envie de participer en groupe. Il y a aussi des étudiants qui ne font pas partie de l’association et qui y vont. J’en connais personnellement.
« La plus grande chose qu’on apprend dans le milieu associatif, c’est de faire confiance aux autres. »
Quels sont les projets futurs de l’association ?
Les gros projets pour cette année portent sur des événements en dehors du prisme EFREIen. Par exemple certains membres sont motivés pour organiser des Cleanwalks avec d’autres associations étudiantes, via notre partenariat avec le REFEDD (Réseau des Étudiants Français pour le Développement Durable) qui regroupe toutes les associations étudiantes homologues à Symbioz en France.
Nous allons également organiser beaucoup de conférences cette année, avec des intervenants. Nous organiserons éventuellement des expositions du travail de certains artistes sur le sujet de l’environnement.
Nous aimerions aussi proposer plus de paniers parce que c’est vrai que les étudiants nous le demandent. C’est une organisation assez conséquente et difficile, mais c’est notre souhait d’en faire plus.
Un travail sur le tri sélectif est aussi au programme. Même si le projet est déjà mis en place, il y a toujours une réflexion en continu : où positionner les poubelles de tri, l’éventualité d’installer des conteneurs, le tri des nombreux cartons lors des événements, le tri du verre lorsqu’il y a des soirées, etc. On a beaucoup de retours à faire à Human’IT sur ces sujets pour tout améliorer.
Le #GroupeEfrei s'engage : des maisons à insecte installées dans le campus par l'asso #Symbioz#Efrei#Esigetel#DeveloppementDurablepic.twitter.com/PJiKYStcaZ
— Guillaume Laurent (@gllmlaurent) February 2, 2017
Quelles sont les leçons que tu tires de ta présidence à l’association Symbioz ?
Je pense que mon plus gros défaut c’est de toujours vouloir en faire trop. La plus grande chose qu’on apprend dans le milieu associatif, c’est de faire confiance aux autres. Quand on confie des projets aux membres, ils le porteront tout aussi bien que les présidents, parce que c’est leur projet et qu’ils ont envie de le finir, autant que le président a envie que l’association marche.
Quelque chose à ajouter ?
Symbioz, c’est une association qui a vraiment pour but de sensibiliser à l’échelle locale et axée sur les étudiants de l’école. C’est petit à petit, en faisant en sorte qu’un maximum d’étudiants soient sensibles à cette cause, conscients de leurs impacts et pensent à l’environnement dans leur vie de tous les jours, dans leur vie professionnelle, qu’on arrivera à avoir un changement positif. C’est pour ça que notre action est importante. L’action ne se fait pas seulement par le haut. Il faut agir à toutes les échelles.
