11,8%. C’est le taux d’étudiants parvenant à intégrer le premier cycle de médecine à l’issue d’une Licence Accès Santé – plus connue sous le nom de L.AS. Du côté de la licence PASS (Parcours d’Accès Spécifique Santé), ce chiffre s’élève à 30%. Face à ces données, plusieurs constats se dressent :
- Une incompréhension de ce système dyadique d’accès aux études de santé
- La frustration des étudiants de L.AS qui bénéficient seulement de quelques cours en médecine
- Un accès inégal en L.AS ou en licence PASS
En résumé, le système actuel, issu d’une réforme de 2019, ne fonctionne pas. C’est la conclusion que tire le rapport de la Cour des Comptes. Selon l’institution, il n’est pas lisible pour les candidats sur Parcoursup et ne permet pas de diversifier les profils des étudiants en santé. Pour changer les choses, ce document évoque trois scénarios. Décryptage.
Option 1 : Le statu quo
Le rapport de la Cour des Comptes évoque la piste du statu quo, précisant tout de même que cette option n’est pas viable en l’état. En cause ? Les inégalités d’accès aux filières MMOP (médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie) entre PASS et L.AS. Les étudiants du Parcours d’Accès Spécifique Santé sont en effet beaucoup mieux accompagnés dans la préparation du concours de fin de première année.
Globalement, la Cour des Comptes identifie une incompréhension du côté des L.AS. Le rapport pointe le fait que « les étudiants souhaitent de façon quasi-unanime suivre plus d’enseignements en santé au sein des formations donnant accès aux filières MMOP ». La promesse, à l’origine de cette réforme, était d’insuffler plus de transdisciplinarité en permettant aux néo-bacheliers de se former dans d’autres univers que simplement la médecine, comme l’histoire, le droit, la psychologie ou les lettres.
Là encore, la réalité est bien différente de ce qui avait été théorisé. La Cour des Comptes constate que « cette idée se heurte au vécu des étudiants de LAS, qui ne bénéficient pas d’un accompagnement suffisant pour la réussite en MMOP ». L’institution conclut en expliquant que « le maintien intégral de l’organisation actuelle (…) viendrait perpétuer voire aggraver » les problèmes que rencontrent les étudiants en difficulté sur le plan académique.
Option 2 : le retour à la PACES
Si ce scénario a été envisagé par la Cour des Comptes, l’institution évoque toutefois l’impossibilité aujourd’hui de revenir à la PACES (Première année commune aux études de santé). En effet, le rapport précise que la réforme PASS/L.AS émanait d’une volonté de s’affranchir de cette formation. « L’éventualité d’un retour à la PACES est rejetée par près de 75 % des universités », apprend-on dans le document.
Option 3 : un accès direct aux filières MMOP
Dans de nombreux pays européens, l’accès aux études de santé se fait directement sur concours après le bac (ou équivalent), avec une intégration des filières de médecine, maïeutique ou pharmacie dès la première année. C’est l’une des pistes envisagées par la Cour des Comptes. Ainsi, la sélection se ferait via Parcoursup avec un processus qui est plus homogène et évite à tout un chacun de perdre une année d’études.
L’inconvénient de cette voie d’accès : les inégalités sociales provoquées par cette refonte totale du programme. Les étudiants les plus favorisés, dotés de moyens pour financer des prépas privées, auraient beaucoup plus de chances d’intégrer ces cursus que les bacheliers issus de milieux défavorisés.
Option 4 : la généralisation de la L.AS
Le problème de la réforme de 2019 est posé par l’existence de la licence PASS. En effet, ceux qui optent pour L.AS – par choix ou par défaut – ont moins d’enseignements en médecine et donc moins de chance d’intégrer les filières MMOP.
Si la Cour des Comptes évoque cette piste, elle considère qu’elle est « risquée ». Le rapport précise que ce scénario entraîne plusieurs problématiques :
- La diversité des formations disponibles complexifie le choix d’orientation
- Le nombre d’heures liées aux études de médecine est bien trop faible pour préparer les étudiants à l’accès aux filières MMOP
En outre, le travail réalisé par la Cour des Comptes témoigne de la difficulté, pour les jeunes de L.AS issus de milieux défavorisés, d’intégrer ensuite le cycle de médecine. « Les étudiants admis en MMOP sont toujours des scientifiques, métropolitains issus de milieux favorisés », précise l’institution dans son rapport.
Option 5 : une voie d'accès unique
Si ces pistes peuvent apparaître comme des solutions viables, elles entraînent des surcoûts pour des universités déjà endettées ainsi que de nouvelles problématiques liées à l’ouverture sociale. Une autre option est possible selon la Cour des Comptes : l’accès par voie unique. L’institution qualifie même cette piste comme « seul scénario viable pour simplifier le système ».
Quels pourraient être les contours de ce nouveau cursus ? D’après ce rapport, il devra intégrer beaucoup plus d’enseignements de santé (entre 45 à 50 crédits ECTS sur 60), pour répondre aux attentes des étudiants qui souhaitent rejoindre les filières MMOP. Si la Cour des Comptes reste assez vague sur le contenu de cette voie d’accès, elle précise toutefois que « cette première année de licence doit être vue comme un portail donnant accès, en fonction du choix de l’étudiant et de ses résultats académiques, à l’ensemble des formations MMOP ».
Le rapport ne souhaite pas revenir sur la diversification des profils et propose que 10 à 15 crédits ECTS soient dédiés à des mineures. L’institution indique toutefois que l’UFR (unité de formation et de recherche) de santé doit être la seule à gérer cette licence d’accès aux études de santé. Cependant, la Cour des Comptes souhaite permettre aux universités qui proposent uniquement la L.AS de conserver cette voie d’accès.
L’ouverture sociale est également au cœur du projet. Pour rapprocher les jeunes issus de milieux défavorisés ou ruraux, la Cour des Comptes recommande d’ouvrir plus de places dans les universités installées au cœur de déserts médicaux, voire de proposer cette voie d’accès dans des antennes universitaires.
Pour l’heure, aucun projet de refonte de la première année des études de santé n’est en cours. Néanmoins, la Cour des Comptes souhaite déployer cette voie d’accès unique dès la rentrée 2026. Un projet qui devra attendre la nomination d’un nouveau ministre de l’Enseignement supérieur.