Mi-décembre, la Cour des Comptes a annoncé vouloir se pencher sur le budget et les dépenses du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. En ligne de mire : la réforme de l’accès au premier cycle des études de médecine de 2020, mais aussi la fin du numerus clausus.
Pour rappel, en 2019, une loi visant à réformer la PACES (première année commune aux études de santé) a donné naissance à une double voie d’accès : PASS et L.AS. La première, également appelée Parcours d’Accès Spécifique Santé, est entièrement dédiée à la préparation du concours de première année donnant accès aux filières MMOP (médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie). La seconde, la Licence Accès Santé, permet de choisir une majeure dans n’importe quelle spécialisation, avec une mineure dédiée à la médecine.
Toutefois, pour la Cour des Comptes, ce modèle ne fonctionne pas. Une simplification est nécessaire comme le témoigne un rapport de 150 pages publié par l’institution pour la Commission des affaires sociales du Sénat. Diplomeo revient en détail sur les conclusions de ce document.
Vers la fin de PASS et L.AS ?
Supprimer cette double voie d’accès pour revenir à un cursus unique : voici la principale conclusion que tire la Cour des Comptes, quatre ans après la mise en place de ces deux formations. Pour l’institution, cette réforme a rendu plus complexe l’orientation des lycéens vers les études de santé. Pire encore, le rapport dénonce également une inégalité d’accès aux filières MMOP, selon les propositions d’admission que les candidats reçoivent sur Parcoursup.
En effet, d’après une note du Sies, 36% des étudiants de PASS intègrent le cycle de médecine à l’issue de leur première année, contre seulement 11,8% des effectifs en L.AS. Dans ce cursus, ils profitent majoritairement de cours qui ne sont pas dédiés aux études de santé. Le rapport indique d’ailleurs que « les LAS1 [première année de Licence Accès Santé, NDLR] sont souvent perçues comme un choix subi, offrant des chances plus faibles pour accéder aux filières MMOP que les PASS ».
Loin de proposer un retour à la PACES, la Cour des Comptes envisage une refonte totale de l'accès aux filières MMOP pour la rentrée 2026. Elle propose une année unique qui replace les enseignements en santé au coeur du cursus. Cette formation ouvrirait ainsi les portes de la médecine, de la maïeutique, de l'odontologie et de la pharmacie en fonction des choix de l'étudiant et de ses résultats académiques. Le rapport précise que « cette première année serait systématiquement considérée comme une première candidature à MMOP ».
La Cour des Comptes propose d'autres pistes, qu'elles jugent plus difficiles à mettre en place, comme le fait de « sélectionner les étudiants en MMOP directement à l’issue du baccalauréat » , une sélection qui s'opérerait « uniquement sur Parcoursup à partir des critères existants ou s’appuyer sur une épreuve nationale que l’étudiant devrait préparer pendant ses années de lycée. » Le rapport précise d’ailleurs que ce fonctionnement est proposé dans plusieurs pays voisins comme l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas ou le Portugal.
S’il s’agit d’une piste envisageable pour les études de santé en France, il faut toutefois garder en tête que ce n’est qu’une proposition de la Cour des Comptes. Actuellement, aucune réforme n’est envisagée pour revenir à un système plus simple pour les étudiants.
Numerus clausus : une mesure nécessaire mais insuffisante
Autre élément pointé dans le rapport : la fin du numerus clausus. Cette mesure devait endiguer les pénuries de professionnels de santé de tous secteurs. Toutefois, la Cour des Comptes a identifié de grandes disparités sur deux points : les régions dans lesquelles évoluent les futurs médecins et les spécialisations choisies.
Dans ce document, la Cour des Comptes indique que « le nombre d’admis en MMOP sur les trois premières années de la réforme a augmenté par rapport à l’année précédente pour les filières médecine (+18%) et odontologie (+14%) mais a diminué pour les autres filières (-6% pour pharmacie, -4% pour maïeutique). »
Le rapport déplore un manque d’investissements du côté des régions qui affichent de faibles densités de professionnels de santé. Il préconise de mieux répartir l’ouverture de places supplémentaires en médecine, au profit des zones géographiques où la pénurie est la plus importante. La Cour des Comptes pousse les régions à organiser des concertations en prenant en compte les besoins locaux et départementaux. Elle incite également les ministères de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et de la Santé à travailler main dans la main. L’objectif ? Attirer davantage d’étudiants en pharmacie et freiner les déserts médicaux.
Quelle conclusion tirer du rapport de la Cour des Comptes ?
L’institution urge les différents ministères impliqués à travailler ensemble pour une meilleure orientation dans les études de santé. Son ambition ? Proposer une réforme radicale du premier cycle de médecine, dès la rentrée 2026, en le pensant de manière européenne.
Le constat de ce rapport est que la volonté de diversifier le parcours et les profils des candidats avec la réforme de 2024 est un échec. La Cour des Comptes précise que « ces nouvelles voies d’accès n’ont pas permis de diversifier le profil des étudiants. Dans les faits, la pression accrue pour accéder aux PASS sur Parcoursup a accentué l’homogénéité des profils des étudiants en PASS par rapport à la PACES ». Ce qui œuvre en défaveur d’un ascenseur social pour les jeunes issus de milieux défavorisés qui se rêvent médecins.