Un outil prometteur, pour répondre aux enjeux du réchauffement climatique. C’est le pari ambitieux que se sont lancés deux jeunes étudiants en deuxième année de classe préparatoire d’école d’ingénieurs à l’ESIEA de Laval (Mayenne). Adrien et Emilio ont lancé MyGarden, une application mobile pour aiguiller les utilisateurs dans la confection d’un potager éco-responsable.
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Leurs rôles sont ainsi bien définis. Quand le premier s’occupe de développer l’application, la structure et tout ce qui relève des éléments techniques, le deuxième gère la base de données et les réseaux sociaux, notamment à travers le compte Instagram de MyGarden.
Pourquoi avoir porté votre choix sur l’ESIEA pour suivre vos études d’ingénieurs ?
Adrien : J’ai eu une orientation assez atypique. En toute franchise, c’est Élise Lucet qui m’a donné envie d’intégrer l’école. En 2015, il y avait un reportage Cash Investigation qui portait sur la cybersécurité pour tester une infrastructure en informatique et les journalistes ont interrogé un professeur et un étudiant à l’ESIEA pour faire un test. Depuis que j’ai regardé ce reportage, j’ai eu un déclic et j’ai rejoint l’école après la terminale.
Emilio : De mon côté, je suis originaire de Laval et j’ai pu me renseigner dès le collège sur l’école. Je ne savais pas si j’allais m’inscrire dans le supérieur, je me voyais vraiment arrêter les études. Puis, au lycée, je me suis intéressé au métier d’ingénieur et j’ai hésité avec une classe prépa. Mais comme je m’ennuie vite et j’ai besoin de faire de la pratique, l’école d’ingénieurs m’a paru comme une évidence. Je suis heureux d’avoir fait ce choix.
Vous avez conçu une application : MyGarden. Comment vous est venue l’idée et quel est son objectif ?
Adrien : MyGarden est une application mobile, dont le premier objectif est d’accompagner l’utilisateur dans le processus de création d’un potager, tout en respectant les principes de rotation de la permaculture, par exemple, pour éviter d’utiliser les produits chimiques qui détruisent la biodiversité. Lorsque l’on veut respecter les principes de permaculture, il y a les bonnes et les mauvaises associations entre fruits et légumes et la rotation des cultures. L’idée m’est venue quand je faisais du potager avec mes parents.
Par exemple, la fraise est un fruit qui appauvrit les sols en nutriments. Pour laisser au sol le temps de se régénérer, il faut attendre 5 ans pour qu’il ait le temps de se revitaliser et mettre d’autres plantes pour limiter les contraintes.
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Le second objectif, c’est d’utiliser la puissance de calcul des algorithmes sur l’appli, qui peuvent faire plusieurs milliers d’opérations à la seconde et ainsi calculer l’une des meilleures solutions pour les fruits et légumes. Si on a 10 fruits et légumes, on a 3 millions de possibilités de placement. À la main, c’est compliqué. Avec un téléphone, même si on ne teste pas toutes les possibilités, on va pouvoir trouver la puissance du calcul pour avoir la meilleure solution.
Emilio : Au lancement de l’appli, l’utilisateur tombe sur une page de présentation avec la base de données. Quand on clique sur un fruit ou un légume, on a des informations sur ses caractéristiques, ses besoins en eau, en compost, etc. Puis, une autre partie plus dynamique, où l’utilisateur peut sélectionner ses fruits et légumes et dessiner grossièrement la forme de ses jardins dans l’application. Celle-ci va donner un plan sur 20 ans, par exemple.
Initialement, c’est Adrien qui a eu cette idée et qui a développé MyGarden. Nous, on s’est rencontré en première année et je me suis greffé au projet pour y contribuer.
Il faut bien préciser que l’application est Open source, c’est-à-dire que des personnes y contribuent et donnent de leur temps pour l’enrichir. À titre d’exemple, l’appli est disponible en français et en anglais et un Allemand de notre communauté l’a également traduit dans sa langue.
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Vous êtes finalistes du concours « Make IT Agri », qui récompense les innovations numériques, robotiques, informatiques, au service d’une agriculture et d’une alimentation durable. Une finale qui aura lieu le 21 juin prochain, à Paris. Comment avez-vous été sélectionné ?
Adrien : On a rempli un dossier d’inscription en décembre dernier, où l’on a demandé d’écrire notre projet. Les organisateurs du concours Make IT Agri font une étude des candidats. Les mois suivants, les équipes ont ensuite des étapes clés avec des rencontres, des présentations, etc. On répond à plusieurs problématiques concernant le réchauffement climatique et le développement durable. On doit expliquer comment on y répond, en faisant un état des lieux de l’agriculture et de la planète.
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À ce propos, en quoi votre projet s’inscrit dans la transition écologique et dans un contexte de réchauffement climatique ?
Adrien : Notre appli n’est pas LA solution : elle apporte une réponse à une partie de la problématique. Il s’agit d’encourager les personnes à faire un potager en se débarrassant des produits qui peuvent détruire les sols. On a besoin de cette diversité pour vivre et pour éviter que certaines espèces ne soient menacées. En somme, il s’agit plutôt d’encourager un nouveau mode d’agriculture, bénéficier de quelque chose de local et favoriser la décentralisation pour se reconnecter avec la nature et le vivant.
Emilio : Exactement, ce sont des solutions qui s’inscrivent dans la transition écologique. Mais il en existe beaucoup et tout dépend de l’ampleur qu’elles prennent. Le principe de MyGarden est d’accompagner les gens dans la gestion de leur potager. Si on dit aux gens de manger plus sainement et de cultiver chez eux, on consomme moins de fruits et légumes industriels et cela permettrait d’avoir moins d’importations et de baisser les émissions de gaz à effet de serre.
Quels sont vos projets pour la suite ? Est-ce que MyGarden va avoir une incidence sur vos ambitions futures et votre projet professionnel ?
Adrien : Évidemment, je vais continuer à développer l’application tant que cela me plaît. Si un jour j’ai envie d’arrêter, je le ferai, mais pour le moment ce n’est pas d’actualité. En ce qui concerne la suite de mes études, j’aimerais travailler sur la cybersécurité et plus particulièrement sur la sécurité des environnements numériques. Je ne suis pas sûr que l’application entre en ligne de mire avec la cybersécurité, mais c’est un projet à part qui est une plus-value.
Emilio : Pour ma part, en termes d’orientation, à l’heure actuelle je ne sais pas encore quel métier je veux exercer plus tard. Je ne me ferme pas de portes, j’essaye de m’intéresser à beaucoup de choses différentes, et je verrai bien où ça me mène.
Concernant MyGarden je suis en adéquation avec Adrien, si cela m’intéresse toujours et que cela avance bien, je continuerai l’aventure avec plaisir. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un projet Open Source et que tout le monde peut apporter sa pierre à l’édifice. Puis, l’application peut très bien être rachetée et reprise par quelqu’un pour prendre la relève.