Une annonce qui inquiète et agite le milieu de l’art français. Alors que le secteur de l’enseignement supérieur en art plastique est en crise, la ministre de la Culture, Rachida Dati, envisage une solution radicale, à savoir “fermer certaines écoles d’art”, a-t-elle déclaré, mardi 19 mars, à l’Assemblée nationale.
“Certaines de ces écoles d’art, en particulier les écoles territoriales, sont en situation de crise, malgré l’engagement confirmé de l’État”, a fait valoir la ministre devant les députés. “Il y a une jungle des écoles et certaines sont très déconnectées de la réalité, y compris des débouchés”, a poursuivi Rachida Dati. “Je souhaiterais des écoles performantes, avec les mêmes chances de réussite et la même ouverture à tous”, a-t-elle conclu.
Madame Dati nous dit que sa priorité au ministère de la Culture sera l'accès de tous à la culture et sur tout le territoire.
Nous l'alertons sur les écoles d’art territoriales à bout de souffle.
Que nous répond Madame Dati ? Elle annonce des fermetures !
Hors de question ! pic.twitter.com/sNarg8NRoz
— Sarah Legrain 🌿 (@S_Legrain) March 21, 2024
Rachida Dati planche sur un “plan global”
Pour en finir avec “la politique des bouts de ficelles”, qui ne “résout aucun problème de fond”, la ministre a annoncé présenter prochainement un “plan global”. Celui-ci n'exclura pas la fermeture des écoles d’art qui “n’ont plus les moyens d’offrir un cadre de qualité” aux étudiants, a souligné Rachida Dati, sans préciser quels établissements pourraient être concernés.
“Il y a des instances d’évaluation pour cela. Ce n’est pas le ministre qui décide. À ce jour, le cabinet a reçu les représentants associatifs, il reçoit les syndicats”, a précisé Rachida Dati. “Nous sommes en train de faire une cartographie précise pour proposer une stratégie de l’enseignement supérieur, qui soit non seulement cohérente, mais aussi ambitieuse”, a-t-elle ajouté. La nouvelle ministre souhaite également développer l’alternance et l’apprentissage dans les écoles d’art, dès septembre 2024.
Un an plus tôt, en mars 2023, l’ex-ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, avait débloqué une aide d’urgence de 2 millions d’euros pour l’enseignement supérieur en arts plastiques. Cette aide faisait suite aux grèves répétées de plusieurs écoles au bord de la faillite, dénonçant un manque de moyens financiers. Un rapport ministériel, paru en octobre 2023, proposait également des pistes de solutions sur les “défis structurels de ces écoles” censées redresser le cap.
Vers une nouvelle mobilisation des étudiants et personnels ?
Avec ces annonces, Rachida Dati envoie un “signal extrêmement préoccupant à l’endroit de l’enseignement supérieur Culture, en particulier dans les territoires”, a réagi l’Andéa (Association nationale des écoles supérieures d’art et design publiques) le 20 mars, alors que les écoles de Valenciennes et de Chalon-sur-Saône sont au bord de la faillite depuis l’an dernier.
“Non, madame la ministre, il ne faut pas fermer des écoles”, alerte l’association dans ce communiqué, appelant plutôt à une réforme structurelle des établissements. “L’évaluation et l’accréditation de ces établissements ne peut être uniquement soumise à la question de la soutenabilité budgétaire”, juge l’association, appelant l’État à “prendre ses responsabilités”. “L'enseignement supérieur Culture ne saurait être considéré comme une variable d'ajustement budgétaire des politiques publiques”, insiste-t-elle.
Même son de cloches pour le Snéad (syndicat inter-professionnel des salariés des écoles d’art territorial). Le syndicat dénonce, dans un communiqué, un “désengagement” du ministère de la Culture qui revient à “abandonner” les écoles d’art publiques au profit du privé. “Les déclarations de madame Dati appellent des clarifications”, ajoute le syndicat, avertissant la ministre d’une “nouvelle mobilisation des étudiants et personnels” si ceux-ci ne sont pas entendus.