Chaque année, Linkee mène une enquête sociologique. Baptisée « Avoir 20 ans en 2025 : état de la précarité étudiante en France », elle se penche sur le quotidien de plus de 20 000 jeunes à travers l’Hexagone.
Cette année, les données récoltées sont plus alarmantes qu’habituellement. L’enquête démontre que plus de 3 étudiants sur 4 ne vivent qu’avec 100 euros par mois, après avoir payé leur loyer et leurs charges. Cela revient à 3,33€ par jour pour se nourrir, s’habiller ou profiter de sorties entre amis. Un chiffre qui inquiète tant par la détresse des jeunes que par l’isolement social que cette crise financière peut provoquer.
Une précarité qui touche les étudiants qui vivent seuls et les femmes
L’enquête de Linkee démontre que près de 51% de la communauté estudiantine a moins de 50€ pour finir le mois, soit 1,67€ par jour. Aujourd’hui, un repas du CROUS pour les étudiants précaires et boursiers s’élève à 1€. Ce qui ne permet de ne manger à sa faim qu’une seule fois en 24h. Tous les niveaux sont concernés : de la L1 au doctorat, en passant par le master.
Cette situation provoque plusieurs problèmes : au-delà de l’évident manque de moyens pour se nourrir à sa faim, elle empêche de participer à toute sortie sociale ou culturelle dès lors qu’elle implique de débourser de l’argent. Bar, restaurant, musée, concert, soirée étudiante, repas entre amis… Les jeunes les plus précaires peuvent se retrouver isolés. Un phénomène d’autant plus dramatique que les personnes seules sont les plus touchées.
50,8% des étudiants en situation de précarité bénéficiant de l’aide alimentaire vivent seuls. Un tiers des jeunes en détresse financière (34,7% exactement) vit en colocation. Malgré une proposition de logements à bas coût, le dégel des loyers a eu un impact significatif sur le pouvoir d’achat des étudiants. Ils sont en effet 21,6% à vivre dans une de ces résidences. Toutefois, la majorité d’entre eux (50%) se loge dans un appartement privé.
Les chiffres de Linkee prouvent que les femmes sont également plus touchées par ce phénomène de précarité. Elles sont 66% à bénéficier d’une aide alimentaire contre 31,9% des hommes. Toutefois, tous les étudiantes ne sont pas logées à la même enseigne. En effet, des disparités géographiques sont à noter. À Montpellier, 72% des jeunes femmes bénéficiant de l’aide alimentaire sont des femmes.
À la question « Au quotidien, as-tu des difficultés financières pour… », les étudiants ont majoritairement répondu :
1. Pour m’alimenter (61,9%)
2. Pour partir en vacances (59,4%)
3. Pour me cultiver (54,8%)
4. Pour m’habiller (44%)
5. Pour faire du sport (40,4%)
Une inflation devenue incontrôlable
© Diplomeo - Chiffres Linkee
D’après l’enquête de Linkee, 60% des jeunes avouent que l’inflation a changé, voire motivé, leur recours à l’aide alimentaire. 34,1% des étudiants qui en bénéficient affirment qu’ils profitent de ce soutien depuis le Covid. Ils sont 45,9% depuis l’inflation. Près de 250 000 colis alimentaires ont été distribués en 2024 par Linkee, contre 100 000 en 2022.
Interrogés par l’association, les étudiants ont fait le point sur les concessions qu’ils ont dû faire depuis le début de l’inflation, en 2022 :
- Les vacances (61,2%)
- Les vêtements (59,8%)
- La culture et les biens culturels (53,4%)
- L’alimentation (53,3%)
- Les abonnements de transports (37,5%)
Aujourd’hui, 60,8% des étudiants qui ont recours à l’aide alimentaire ne sont pas boursiers. Étudiante en design à Nantes, Gabrielle (21 ans), confie : « Malheureusement puisque mon école est privée je n’ai pas le droit à la bourse alors que je devrais toucher au plus haut échelon. Mes parents ne sont pas financièrement stables. Avec mon job étudiant je ne touche pas assez pour mon loyer, mais je ne peux pas me permettre de faire plus d’horaires à cause du planning de mon école qui n’est pas fixe. »
L’impact délétère de la précarité sur la réussite
Préoccupés par leur situation financière ou incapables de se loger, se vêtir et se nourrir dans d’excellentes conditions, les étudiants ne perçoivent pas les impacts de la précarité que sur leur compte en banque. Les études en pâtissent également.
Cela passe tout d’abord par le manque de moyens pour se fournir en manuels, cahiers, ordinateurs… 34% des élèves n’ont pas les moyens de s’acheter des livres pour suivre leurs cours, tandis que 28% des étudiants en situation de précarité travaillent sans PC. 15% des personnes interrogées confient également ne pas avoir d’espace calme où travailler.
Mais ce n’est pas tout ! Face à la pression financière liée au loyer et à l’alimentation, certains envisagent même de tout arrêter. 12% des sondés affirment avoir déjà redoublé ou raté un concours à cause de leur job étudiant. 25% des jeunes envisagent d’arrêter totalement leurs études.
Fatigue, stress, épuisement… Les conséquences sur la santé mentale sont dramatiques. 25% des jeunes interrogés confient avoir ressenti de l’anxiété au cours des derniers mois. Isolés par le manque de moyens, ils se retrouvent seuls face à leurs problèmes. « Je ne souhaite pas parler de ma situation car cela me fait honte », conclut Selma, étudiante en mathématiques à Montpellier.