L’augmentation du nombre d’étudiants dans le supérieur n’a pas perturbé l’offre de logements. Selon un rapport de la Cour des comptes, l’essor du nombre d’étudiants (+25% entre 2013 et 2023) a pu être encaissé, grâce à deux leviers : le versement des APL à tous et l’élargissement du parc de logements sociaux.
Alors que le pays compte aujourd’hui près de 3 millions d’étudiants, les dispositifs de soutien ne corrigent pas les écarts entre territoires. Certains étudiants ne bénéficient pas des mêmes accès au logement selon les régions. En tête : l'Île-de-France, première région étudiante de France, qui reste en difficulté.
Île‑de‑France : « un marché du logement sous tension »
Selon le rapport, les étudiants de la région francilienne représentent, à eux seuls, plus du quart des effectifs de l’enseignement supérieur de l’Hexagone. De fait, leurs conditions d’accès au logement s'avèrent plus difficiles. « Malgré un rattrapage entre 2012 et 2017, la capacité d’accueil du parc étudiant à vocation sociale reste inférieure à la moyenne nationale », précise la cour des comptes.
Les étudiants de Paris et de sa banlieue subissent aussi des temps de transport plus longs et des taux de cohabitation élevés (47 % en IDF vs 27 % ailleurs), dans un contexte de « marché du logement sous tension ». C’est la raison pour laquelle la Cour des comptes demande aux pouvoirs publics de « centrer leur attention » sur la région parisienne, qui « présente de réels signes de décrochage » en termes de logement, par rapport au reste du territoire.
En 2023, la Cour des comptes explique qu’il existe environ 245 000 logements étudiants à vocation sociale, ce qui permet de maintenir un ratio stable de 8,2 logements pour 100 étudiants à l’échelle nationale. Pourtant, ce chiffre n’est pas le même. Selon les grandes villes estudiantines : le ratio est de 13,23 à Orléans, 10,20 à Nancy mais chute à 7,37 pour l'Île-de-France et 3,37 pour Paris.
© Cour des Comptes
Une meilleure répartition des logements selon les besoins locaux
En plus des fortes différences entre régions, la Cour des comptes déplore le fait que l’action publique se concentre presque uniquement sur les logements Crous. En effet, l’État a investi à la fois dans la construction de nouveaux logements et dans la rénovation des anciens, avec 1 milliard d’euros dépensé entre 2017 et 2023. Une transformation qui a aussi un effet négatif : elle a fait perdre 11 000 places dans les résidences Crous, car les studios prennent plus de place que les appartements.
Plutôt que de se contenter d’objectifs quantitatifs globaux, la Cour des comptes appelle à une véritable stratégie nationale, avec une meilleure répartition des efforts des logements selon les besoins locaux. Il s’agirait, par exemple, d’adapter les aides et les projets de construction en fonction des loyers, du nombre de demandes, et des tensions du marché du logement propres à chaque région.
Quand recherche de logement rime avec insécurité et soucis de mobilité
Pour avoir une idée concrète de ce que vivent les étudiants en matière de logement, la Cour des comptes est allée à leur rencontre dans plusieurs villes (Paris, Cergy, Bordeaux, Lyon et Orléans), réunissant au total 56 étudiants aux profils diversifiés.
Par exemple, la recherche de logement est souvent vécue comme une période de grande insécurité. Les étudiants évoquent un climat de stress lié à la peur de perdre leur toit, certains parlant de « sécuriser leur logement », quand d’autres affirment avoir été victimes d’arnaques lors de leur recherche. « Après le Crous, j’ai voulu chercher un appartement avec une amie proche, mais on s’est fait arnaquer, l’adresse n’existait pas. Je me suis dit que c’était un signe », raconte une étudiante de Cergy. Une autre jeune orléanaise témoigne : « Quand je cherchais, j’ai eu des annonces frauduleuses qui demandaient des paiements en avance… j’ai failli me faire avoir plusieurs fois ».
À Lyon, un autre étudiant sondé met en avant la question de la mobilité : « J’étais obligé de le garder. Ce sont 2 mois où il ne sert à rien car je ne peux pas le sous-louer. Je l’ai trouvé en juin donc je n’allais pas dire que je préférais en trouver un dispo à partir de septembre. Je n’avais pas le choix ». Enfin, un autre étudiant bordelais préconise : « Une allocation universelle (qui) permettrait à plus d’étudiants de partir étudier ailleurs, sans dépendre uniquement de leurs parents ou d’un job étudiant ».