Voilà une promesse de campagne que tous n’aimeraient pas voir se réaliser. Alors qu’il n’a pas encore été mis en place, le service national universel (SNU) du président Macron a déjà ses détracteurs et ses soutiens, notamment chez les principaux intéressés : les jeunes.
Les contours d’un projet qui se concrétise
Emmanuel Macron l’annonçait dès 2017, en faisant campagne pour la présidence de la République française : « J’instaurerai un service national de durée courte, obligatoire et universel », afin de « permettre à l’ensemble de notre jeunesse de faire l’expérience de la vie militaire et d’être des acteurs à part entière de l’esprit de défense ».
Après diverses tergiversations et incertitudes relatives à ce projet, le président de la République a réaffirmé en début d’année 2018 sa volonté de mettre en place sa proposition. À la fin du mois de janvier, un groupe de travail piloté par un général, Daniel Ménaouine, a été lancé pour donner à l’issue du mois d’avril des conclusions plus concrètes.
Lundi 19 novembre 2018, le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation, Gabriel Attal, a annoncé dans une interview au parisien que le service national universel allait être testé dès le mois de juin 2019. Cependant, l’entrée en vigueur du service obligatoire pour tous les jeunes n’a pas encore été fixée, même si un premier rapport évoque 2026.
Voilà ce que l’on sait à l’heure actuelle du service national universel :
- Il concernerait tous les jeunes, filles et garçons, âgés de 16 à 21 ans. Chaque année, ils seraient environ 600 000 à 800 000 jeunes appelés pour effectuer leur SNU.
- Il se composerait d’une première phase obligatoire d’une durée d’un mois pour les 15 à 18 ans, dont une partie serait faite en internat. L’ensemble serait consacré notamment aux activités sportives et à l’apprentissage des gestes de premiers secours.
- Cette première étape serait suivie d’une seconde phase optionnelle d’une durée de trois à six mois, basée sur le volontariat et tournée sur l’engament civique.
- Il ne s’agirait pas d’un programme à forte dimension militaire : les intervenants à caractère militaire seront limités et les savoirs et techniques tels que le maniement des armes par exemple seraient exclus.
Enfin, le rapport préconise une consultation de la jeunesse pour avoir son avis sur le projet, avant même que n’intervienne l’arbitrage du président : mais les jeunes n’ont pas attendu que question leur soit posée pour monter au créneau et faire entendre leur voix.
La colère des organisations de jeunesse
Tribune signée par 15 orga de jeunesse contre la mise en place du service national universel ! Non au paternalisme oui à l’autonomie des jeunes ! @UNEF via @leJDDhttps://t.co/9LLFIuxqxL
— Lilâ Le Bas (@Lila_Lebas) 3 juin 2018
15 associations d’étudiants, lycéens et autres organisations de la jeunesse — dont les deux premiers syndicats étudiants que sont la Fage et l’UNEF, mais aussi Les Jeunes Écologistes, etc. — ont donc publié une tribune dans Le Journal du Dimanche le 2 juin 2018 pour dénoncer les failles du service national universel.
Avant tout, les auteurs y affirment qu’ils auraient préféré que les principaux intéressés soient consultés en amont pour bâtir ce projet et que « la jeunesse ne peut être tenue à l’écart des projets qui la concernent par des politiques paternalistes ».
Selon les écrits des intervenants, le service national universel reposerait davantage sur une « logique démagogique », et a cela de mauvais qu’il instaure un « cadre obligatoire, rigide et contraignant » au lieu de permettre à des jeunes de s’engager « de façon souple et diverse, dans une recherche de sens comme d’épanouissement ».
D’autre part, les différents groupes à l’origine de la tribune considèrent que le retour d’une forme de service militaire n’est pas la solution pour favoriser la mixité sociale et pour aider les jeunes en difficulté, et que pour ce faire, le gouvernement devrait se concentrer en priorité sur d’autres points cruciaux que sont « la prévention des risques, le passage du code de la route, les formations sur l’égalité femmes-hommes, les enjeux climatiques, la découverte d’autres cultures, etc. »
Notre sondage : une majorité de jeunes approuve le projet
Diplomeo a souhaité connaître via un sondage l’avis des 15-25 ans sur le service national universel. Les résultats obtenus témoignent d’une tendance à l’approbation chez les jeunes, bien qu’ils expriment des réserves sur certaines modalités du projet.
Des jeunes informés et plutôt emballés…
Les chiffres du sondage nous apprennent en premier lieu que 80 % des jeunes étaient au courant de l’ambition de service national universel du gouvernement. Un projet que les sondés affirment approuver à 63 %. Ils sont de surcroît plus de la moitié (55 %) à déclarer être d’accord avec le caractère obligatoire du service. Par ailleurs, 52 % trouvent le projet dans ses contours actuels intéressant, et 42 % le disent même nécessaire.
… Mais des réserves qui persistent
Si les chiffres semblent adouber le projet d’Emmanuel Macron, il n’en reste pas moins que certains chiffres viennent nuancer cette tendance. En effet, 53 % des interrogés estiment qu’à 15 ans, on est trop jeune pour effectuer ce service. D’autre part, si 31 % se disent prêts à effectuer ce service immédiatement, ils sont tout de même 27 % à répondre « non, pas du tout » à cette question. Enfin, 38 % disent que la durée d’un mois est trop longue, 30 % qualifient le projet de sévère et contraignant, et 21 % le jugent dépassé et rétrograde.
C’est certain, le service national universel n’a pas fini de faire parler de lui. La prochaine étape reste donc celle des arbitrages rendus par l’Élysée, qui seront peut-être influencés par ces premières réactions de la jeunesse.