Audace entre les glaces : quatre étudiants ingé mettent les voiles vers le Grand Nord norvégien

Quatre élèves-ingénieurs de CentraleSupélec ont réalisé une expédition de cinq mois à bord d’un voilier électrique sur les côtes norvégiennes. Au programme : sports d’hiver, ours polaires et énergies renouvelables !
Mis à jour le / Publié en avril 2023
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© Kahuna

Yvan Lazard, Baptistin Coutance, Quentin Lustig et Robin Villard, quatre élèves ingénieurs de CentraleSupélec se sont jetés à l’eau. Après avoir intégré l’école via les concours post-prépa, ils décident de profiter d’une année de césure entre leur deuxième et leur troisième année. À bac +4 et alors âgés de 22 et 23 ans, ils se lancent dans une expédition de Lorient au Svalbard (Norvège) du 5 mars au 23 juillet 2022 à bord d’un voilier électrique nommé Kahuna

Les objectifs ? D’une part, la réalisation d’un projet personnel de groupe, de l’autre, la réalisation du bilan énergétique d’un voilier plus écoresponsable que la majorité de ceux mis en vente.

Un projet qui n’avait pas au départ pour objectif d’être filmé, mais qui a finalement accouché d’un court métrageKahuna : L’Arctique au gré des vents. Il est projeté dans plusieurs salles de l’hexagone, mais aussi à l’étranger, comme en Roumanie ou aux États-Unis. À l’occasion de la projection du 29 mars dernier à Paris, la rédaction de Diplomeo a rencontré Robin, « l’homme multitâche » de l’équipage.

Avec des décors naturels à couper le souffle et une bande-son parfois émouvante, souvent entraînante, mais toujours pertinente, le film est déjà un incontournable pour les passionnés d’aventures. On vous raconte leur histoire !

Au prélude, quatre passionnés d’escalade et la soif d’aventure

Tout commence durant l’automne 2020. La COVID-19 fait une entrée fracassante en France, le confinement est annoncé et jeunes comme moins jeunes se retrouvent isolés comme jamais auparavant. Pour Yvan et Baptistin, l’envie de grand air se fait clairement sentir. Le Toulousain et le Haut-Pyrénéen sont tous les deux des alpinistes confirmés. Ils encadrent déjà des sorties d’initiation proposées à leurs camarades dans le cadre du Club Montagne de Centrale. 

En plus de son expérience du paradis blanc, Yvan est également moniteur de voile. Restreint dans ses déplacements, le futur capitaine de Kahuna a peu à peu l’idée d’un projet personnel alliant ses deux environnements de prédilections. L’aventurier en manque de sensations fortes ouvre alors Google Maps, à la recherche d’une destination rêvée. Jetant d’abord leur dévolu sur le Groenland, ils optent finalement pour les côtes norvégiennes.


© Kahuna — L’itinéraire de l’expédition

Qui a dit que colocation ne faisait pas bonne union ? C’est en Quentin et Robin, leurs colocataires de la résidence de l’école, qu’ils trouvent des compagnons de voyage de confiance. Dès lors, les préparatifs commencent. Stages intensifs de ski, de randonnées sur neige, de voile, mais aussi permis de bateau et de chasse : chacun se perfectionne pour mener à bout le projet et le tout en quelques mois seulement !

« Un des challenges les plus compliqués a été d’avoir la confiance de l’école pour qu’elle nous laisse partir dans le cadre de la césure », admet Robin. En effet, c’est dans le cadre d’une année de césure convenue avec l’école que les quatre étudiants-ingénieurs prévoient leur voyage. L’aventure humaine ne suffit pas, ils doivent aussi avoir un objectif académique

Ce voyage sera alors également l’occasion de mener un projet d’expérimentations sur voilier électrique, en partenariat avec le laboratoire de Génie industriel de l’école. Dans un premier temps, ils consacrent leur césure à la réalisation de stages professionnels de plusieurs mois. 

Kahuna est le nom du voilier électrique à bord duquel ils prennent le large. Il est conçu dans le chantier naval JPK Composites, par des connaissances d’Yvan. C’est donc volontiers que les quatre matelots se voient louer le voilier fraîchement sorti d’usine.  

Arrive le jour J, le 5 mars 2022. Top départ et cap sur le Svalbard !

Vient la mise à l’eau du voilier et parfois celle des matelots 

Ce jour-là, Yvan, Baptistin, Quentin et Robin mettent les voiles de Lorient à bord de Kahuna. S’ensuit un voyage de 5 mois rempli de péripéties, même si particulièrement bien préparé. 

Grand froid et grand-voile, ils partent équipés et sont prêts à tout affronter. Matériel de voile et d’alpinisme, doudounes et anoraks, stocks de fromages et de pâtes… rien ne manque à l’appel et la motivation n’est pas en reste. 

Sur leur chemin, ils tombent sur des paysages époustouflants que très peu ont l’occasion d’admirer. Avant de naviguer entre les glaciers, ils contournent notamment des plateformes pétrolières, des supertankers et des champs d’éoliennes. Ils sont aussi les spectateurs de nombreuses autres merveilles, comme des couchers de soleil ou des aurores boréales.


© Kahuna — Les quatre étudiants escaladent un sommet.

Des embûches, il y en a, mais les voyageurs parviennent toujours à en venir à bout. Par exemple, lorsque la bôme (le support de la voile accroché au mât) se plie rendant alors impossible l’utilisation de la grand-voile, ils font face. Ils en commandent une neuve auprès du chantier JPK Composites, lequel la livre à Tromsø (Norvège). 

Le coup de la panne, ils l’ont également vécu, lorsque le moteur de Kahuna s’est bloqué en pleine nuit. En cause ? La chaîne d’une bouée prise au piège dans une hélice du voilier. Là encore, ils gardent leur sang-froid. Au vu des températures (4 °C), il ne pouvait de toute façon pas en être autrement. Ni une, ni deux, Robin revêt sa tenue de plongée, armé d’un couteau, et disparaît dans l’eau noire pour libérer le moteur.

Estomac ou bateau retourné, rien ne les défait. « On devait suivre à chaque fois la bonne neige », nous confie Robin. En effet, ces quatre sportifs téméraires avancent au gré du dégel, à la recherche de sommets praticables. Ils s’adonnent alors au ski sur des versants encore jamais empruntés, à l’escalade sur des pentes qui sont tout sauf nivelées, au ski nautique sur des lacs presque gelés ou encore au paddle avec des bouts de glaciers en guise de planches. 


© Kahuna — Quentin s’exerce au paddle à dos d’iceberg

Après avoir fait des Alpes de Lyngen (Norvège) leur terrain de jeu, ils atteignent les Svalbard. Sur ce « paradis sur terre », ils règnent aux côtés d’infinies étendues blanches, d’ours polaires ou encore, de morses. Les conditions ne sont pas faciles et il faut être constamment alerte des dangers environnants, pourtant ils tiennent bon. « Le soleil ne se couchait jamais et rayonnait en permanence, mais ça donnait vraiment une atmosphère énergisante. Ça nous boostait complètement », nous rapporte Robin.

Néophytes, ils vont jusqu’à battre un record : le 16 juin 2022, Kahuna franchit le 80e parallèle et devient le premier voilier à propulsion électrique à aller aussi loin au nord. Les quatre jeunes hommes n’en demeurent pas moins des étudiants. Au rythme des vagues, ils doivent rédiger leurs lettres de motivation pour intégrer la mention de troisième année de leur choix. Un rappel à la réalité. Durant le voyage retour, au fur et à mesure qu’ils se rapprochent de la mère patrie, ils troquent leurs doudounes contre des t-shirts. Ils regagnent la capitale en pleine canicule.

Entre recul de la calotte glaciaire et ode au culot : un bilan engageant 

En revenant sur les moments marquants de son expédition, Robin met la lumière sur un élément sans conteste primordial : la question environnementale.

C’est même l’un des points de départ du voyage. Kahuna fonctionne grâce à la propulsion électrique et est rechargeable. Le voilier est également équipé de panneaux solaires. Exit donc, le moteur diesel.

L’équipage met un point d’honneur à la sobriété énergétique tout au long de sa navigation : ni les moteurs ni les chauffages ne fonctionnent à plein régime. Les élèves ingénieurs s’appliquent à avoir un impact des plus moindres sur les milieux qu’ils visitent, mer ou banquise. 

Un voilier électrique est-il une solution intéressante pour la planète et les plaisanciers ? D’après leurs conclusions, les émissions directes de CO2 de Kahuna sont minimes (2 tonnes) mais la rentabilité d’un tel voilier n’est pas encore optimale.


© Kahuna — Un ours polaire est surpris par le drone de l’équipe.

Tout au long de ces 12 000 kilomètres parcourus, Robin et ses camarades sont des témoins directs des effets du changement climatique : « La faune, la flore et la glaciologie sont très impactées par le réchauffement climatique. Chaque année, ça se réchauffe davantage. Il y avait même des moments où on était en t-shirt alors que ce n’est pas censé être la norme. »

De ce périple, Robin tire aussi des enseignements  de vie. D’ailleurs, « C’est l’aventure d’une vie ». Elle lui a appris à oser, à avoir davantage confiance en lui et à aimer se dépasser. Ces enseignements font également écho aux valeurs de Centrale. « C’est vrai qu’on a quand même utilisé beaucoup de compétences qu’on nous enseigne à l’école. Par exemple, la façon de se débrouiller et d’apprendre de nouvelles choses », raconte Robin. « Ou alors, le fait de ne pas forcément être expert dans un domaine, mais d’aller au-devant de ses lacunes, de découvrir un champ de compétences et de le maîtriser le plus rapidement possible. » ajoute-t-il, fièrement.

Le jeune homme appelle tout autre étudiant à sauter le pas et à se lancer dans des projets personnels de pareille ampleur. Pour lui, ce sont des plus-values uniques qui font la différence lors d’une candidature à un poste ou à une formation. « Être capable de montrer un projet complet avec les ambitions et les objectifs liés, c’est forcément un avantage. Les entreprises sont très intéressées par les profils qui montrent qu’ils peuvent sortir un peu de la routine et créer quelque chose par eux-mêmes. »

Quand on demande à Robin si la vie dans les fjords lui manque, c’est plutôt une réponse pondérée qu’il fournit : « C’est une vie différente, peut-être moins riche en rebondissements, mais elle a aussi ses intérêts. Finalement, on aime bien aussi le confort. On a tous nos habitudes : avoir une douche, avoir un lit, avoir nos amis et notre famille au plus près. C’est un retour à des choses plus essentielles. » Pour le moment, les quatre étudiants définissent encore leur projet professionnel et réalisent leur stage de fin d’études.

Depuis l’automne 2022, Yvan, Baptistin, Quentin et Robin font la tournée des cinémas du pays dans lesquels leur film est projeté. À la fin de chaque projection, ils échangent avec les spectateurs et continuent d’inspirer les gens à oser se lancer dans la réalisation de projets qui leur tiennent à cœur. Le film qu’ils ont monté eux-mêmes, en un temps record, se conclut par la phrase suivante : « Si on attend d’être prêt, on ne part jamais ». 

Pour rester à l’affut des prochaines projections du film Kahuna : l’Arctique au gré des vents, rendez-vous sur le site et les réseaux de l’équipe !

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