Les grandes écoles de commerce et d’ingénieurs ont clairement décidé de miser sur la formation professionnelle, depuis quelques années, pour continuer de se développer. Une tendance de fond qui devrait s’accentuer, avec les évolutions de la loi sur la formation professionnelle.
Développement de formations sur-mesure pour les entreprises, lancement de certificats et d’Executive MBA, mise en avant de programmes courts… Depuis quelques années désormais, les grandes écoles de commerce et d’ingénieurs ont tendance à de plus en plus miser sur la formation professionnelle - ou formation continue -, même si aujourd’hui seulement une poignée d’établissements est parvenue à s’imposer sur ce segment en plein développement. « Nous avons deux grandes priorités : l’international et la formation continue, en proposant notamment des MBA, des MBA spécialisés, de la VAE… », affirme ainsi Stéphane Boiteux, directeur général de l’école de commerce IDRAC. « Notre objectif est de passer d’une Business School à une School for Business. Nous accélérons ainsi et nous nous focalisons sur un certain nombre d’actions, notamment en matière de formation continue », insiste de son côté Loïck Roche, directeur de Grenoble Ecole de Management (GEM).
La formation continue, un important levier de croissance
Plusieurs raisons expliquent cet engouement en pleine expansion. « La première raison est la mission première des grandes écoles d’être en prise directe avec les entreprises, et de former notamment au management », souligne Laurent Amice, directeur des programmes Interentreprises & Executive Mastères Spécialisés de ESCP Europe. « Un autre aspect relève de la stratégie des grandes écoles : pour avoir des ressources propres, la formation continue peut se révéler être un important levier de croissance. La formation professionnelle représente ainsi 20 % du budget de l’école, et cela devrait augmenter dans les prochaines années », ajoute le responsable de la grande école parisienne.
Un argument confirmé par Gaël Fouillard, directeur de la formation continue à GEM. « La formation professionnelle est une des activités des grandes écoles qui doit permettre de rapporter de l’argent. C’est un moyen, pour un établissement supérieur, de diversifier ses activités, et c’est un relai de croissance de plus en plus important. Mais il y a une raison plus pertinente pour moi expliquant ce fort développement : la formation professionnelle est un bon complément dans l’offre globale des écoles. Cela permet d’offrir un service supplémentaire, et de proposer une cohérence d’offres assez naturelle. »
Une prise de conscience des écoles et des entreprises
De son côté, Anne Thiercy, directrice de la formation continue d’Arts et Métiers Paris-Tech, met en avant l’évolution sociétale inéluctable. « La loi sur la formation professionnelle date de 1971, et les mœurs mettent toujours beaucoup de temps à bouger, même si ça a énormément accéléré ces dernières années… Il y a eu une véritable prise de conscience des grandes écoles, qui considèrent désormais la formation continue comme une mission fondamentale, mais également des entreprises et des salariés. Le fond du sujet tient à l’évolution globale de la société, qui a désormais un regard différent sur la formation professionnelle », insiste-t-elle.
« Pour les entreprises, la formation professionnelle permet de fidéliser et de faire passer des messages. D’autant que les métiers évoluent de plus en plus vite, et une entreprise qui ne forme pas prend des risques de perdre des marchés ! Former tout au long de la vie devient de ce fait une obligation », met en avant Catherine Maillet, directeur de la formation continue à l’ESTP.
Des stratégies variées pour se positionner ou se démarquer
À la recherche de nouvelles opportunités de croissance sur un marché de plus en plus compliqué, les grandes écoles de commerce et d’ingénieurs multiplient les stratégies pour bien se positionner ou se démarquer. ESCP Europe vient ainsi de revoir en profondeur son offre de programmes, avec l’objectif de renforcer les cursus certifiants et diplômants d’une part, et de développer de nouvelles offres thématiques ou sectorielles d’autre part. Audencia Group a, lui, dernièrement lancé un Executive DBA (Doctorate in Business Administration) in Responsable Management, en partenariat avec l’université chinoise de Tsinghua, dans le but de former des managers chinois de haut niveau capables d’intégrer les enjeux sociaux et sociétaux dans leur stratégie. De son côté, l’Essec vient de dévoiler un nouvel Executive Mastère Spécialisé « LIIP » (Leading international industrial projets), en partenariat avec l’Ecole Polytechnique. Et ce, avec l’objectif affirmé d’accueillir non seulement des cadres en activité, mais également des candidats en reconversion professionnelle. « Le vrai défi et le grand enjeu de la formation continue, c’est la reconversion et la réorientation professionnelle. Autrefois, on faisait le métier pour lequel on était formé toute sa vie. C’est désormais de moins en moins le cas, avec une véritable évolution sociétale qui n’est pas prête de se terminer », conclut Anne Thiercy.