Un fléau que l’on retrouve malheureusement aussi après le lycée. Dans l’enseignement supérieur, certains étudiants n’échappent pas au harcèlement. Que ce soit en ligne ou physiquement sur les campus, les conséquences peuvent être lourdes pour les victimes, d’un point de vue psychologique, mais aussi académique.
Depuis plusieurs années, à la faveur de la libération de la parole contre les violences sexistes et sexuelles — avec le mouvement Metoo notamment —, les acteurs du supérieur montent au créneau pour combattre ce phénomène difficilement quantifiable. Suivi psychologique, prévention auprès des étudiants, mais aussi des profs, formations… Plusieurs leviers sont déployés.
Diplomeo a échangé avec les responsables des cellules anti-harcèlement de la business school EM Normandie et de l’école d’ingénieurs ESIEA, qui ont mis en place des mesures fortes contre le harcèlement.
Un phénomène aux conséquences « dramatiques » bien présent dans le supérieur
Agressions verbales répétées, intimidations, rumeurs, chantage… Sur les réseaux sociaux, où l’effet de meute peut être décuplé, ou au sein des campus, le harcèlement peut prendre diverses formes. Il conduit généralement au discrédit et à l’isolement de la personne visée. S’il est défini par la loi, il n’est pas toujours évident pour la victime ou un témoin, direct ou indirect, de l’identifier.
« Quoi qu’il vous arrive, quoi que vous pensiez, quoi que vous ayez vu, il faut en parler », résume Sophie Poirier, référente harcèlement à l’ESIEA. « Il ne faut pas rester sans rien dire face à une situation qui ne vous paraît pas normale », insiste-t-elle. La responsable souligne que le harcèlement dans le supérieur peut venir de ses camarades de classe, de l’extérieur, mais également de figuresd’autorité ou de supérieurs hiérarchiques, comme des professeurs ou des membres du personnel administratif.
Et les conséquences du harcèlement peuvent être « dramatiques », prévient de son côté Alice Duval, référente du service équilibre et inclusion, chargé des questions du harcèlement, sur le campus de Caen de l’EM Normandie. Baisse de la concentration et de la motivation, isolement, anxiété, dépression, stress post-traumatique : « le risque, c’est le décrochage académique, voire pire », souligne-t-elle. « La souffrance s’accentue souvent en raison du silence ou de l’indifférence qui entoure le harcèlement », ajoute Alice Duval.
Les étudiants, « meilleurs ambassadeurs » contre le harcèlement
C’est précisément pour briser ce silence que l’ESIEA et l’EM Normandie mettent en place, comme de nombreux autres établissements du supérieur en France, des dispositifs de lutte contre le harcèlement. À commencer par la création de cellules dédiées sur les campus, qui travaillent en collaboration avec des associations, des psychologues et des conseillers pédagogiques.
« Si notre enquête confirme un comportement abusif, on écarte sans hésiter l’agresseur », Sophie Poirier, référente harcèlement à l'ESIEA
Ces structures dédiées à l’écoute et au suivi des victimes offrent un espace de parole sécurisé. Elles sont chargées de lancer une enquête interne lorsqu’un cas de harcèlement est signalé, avant de prendre les sanctions adaptées, au regard du règlement de l’école. Et dans chacun des établissements, c’est tolérance zéro : « si notre enquête confirme un comportement abusif, on écarte sans hésiter l’agresseur », affirme Sophie Poirier. Il arrive aussi que la victime ne souhaite pas qu’il y ait de poursuites. Auquel cas les équipes pédagogiques s’attachent à mettre en sécurité la victime et à garder un œil sur elle, précise Alice Duval.
En parallèle de ces structures, la prévention et la sensibilisation jouent un rôle majeur. À chaque rentrée, les établissements organisent des ateliers, des formations et des campagnes de sensibilisation à destination des étudiants et du personnel. L’objectif : informer sur les signes d’identification du harcèlement, rappeler les conséquences juridiques et encourager les témoins à intervenir ou signaler des comportements suspects.
Des outils précieux que les étudiants se transmettent entre eux. « Nos meilleurs ambassadeurs, ce sont nos étudiants », souligne Alice Duval. Au sein de l’école, plusieurs étudiants référents sur la question du harcèlement sont formés à être des interlocuteurs de confiance. En soirée étudiante, à la fac ou ailleurs, ils sont capables d’identifier une situation anormale et de réagir. Le but : construire un environnement de confiance pour, peut-être un jour, enfin éradiquer ce fléau.