« On est capables de faire de grandes choses » : au Sénat, des lycéens boursiers plaident pour leur avenir dans le supérieur

Fin février, 160 lycéens bénéficiaires des programmes d’égalité des chances du réseau Sciences Po ont présenté le temps d’une journée leurs projets d’avenir au Sénat. Une manifestation qui vise à démocratiser l’accès dans le supérieur et à faire naître des vocations. Reportage.
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Les meilleurs lycéens boursiers ont été récompensés d'une bourse d'aide à l'installation dans les études supérieures de 900 euros. © Agence initiale

180 secondes pour convaincre. Sous l’œil attentif des jurés et les encouragements de leurs camarades, les lycéens se succèdent au pupitre de l’amphithéâtre. En moins de trois minutes, ils retracent leur parcours, évoquent leurs passions et dessinent leur avenir dans une République idéale. Un exercice chronométré, inhabituel et impressionnant, dans un lieu chargé de symboles : le Sénat. 

Vendredi 23 février, le Palais du Luxembourg à Paris accueillait un joyeux ballet de 160 lycéens boursiers, bénéficiaires des programmes d’égalité des chances du réseau Sciences Po. La veille, c’est au sein du prestigieux lycée Henri-IV que ces élèves tirés au sort et venus des quatre coins de l’Hexagone ont préparé leur prise de parole sur le thème « Mon projet / Notre République ». 

Vingt d’entre eux ont été retenus pour soutenir leur récit au Sénat. À la clé pour les plus convaincants : une bourse de 900 euros d’aide à l’installation dans l’enseignement supérieur. Retour sur cet événement inédit, organisé par les dix Sciences Po, qui vise à démocratiser l’accès aux études supérieures et à créer des vocations.

 

 « Casser les représentations » en donnant la parole aux jeunes

Fabien est le premier à s'exprimer dans l’amphi. Celui qui se décrit auprès du jury comme « excentrique, honnête et franc » rêve d’intégrer Sciences Po Bordeaux, pour ensuite travailler dans la diplomatie et œuvrer pour la paix. Une ambition qui passe par la parole, outil libérateur indispensable qu’il aimerait voir plus souvent entre les mains de la jeunesse.

« Ce qu’il manque aux jeunes, c’est la parole : ils ne sont pas assez écoutés et n’ont pas de représentants », regrette le Marseillais qui a grandi dans les quartiers Nord, après son passage sur scène. « Cela leur apporterait une légitimité, et leur permettrait de se projeter », assure-t-il. 

« On veut montrer, au travers des récits de ces élèves boursiers, que l’avenir est possible », Paul Vinaches, professeur à Sciences Po Toulouse

« L’idée de ce projet est d’entendre la jeunesse des territoires », nous rappelle Paul Vinaches, professeur à l’IEP Sciences Po Toulouse et responsable des programmes de démocratisation du réseau Sciences Po. « On veut montrer, au travers des récits de ces élèves, que l’avenir est possible. Et casser un certain nombre de représentations que l’on peut avoir, parce qu’ils viennent de territoires ou qu’ils sont issus de la diversité », ajoute-t-il.  

Les participants ont préparé leur prise de parole au Sénat au sein du prestigieux lycée Henri-IV, jeudi 22 février 2024 © Agence initiale

« Le sens que l’on a voulu donner à cette mise en scène, c’est de légitimer les jeunes par leur parole dans un lieu symbolique, avec un jury prestigieux », insiste-t-il.

« Derniers déclics »

La question de la légitimité trotte dans l’esprit de la plupart des jeunes que nous avons rencontrés. « On n’est pas condamnés à l’échec parce que l’on vient de milieux défavorisés en banlieue ou à la campagne », juge pourtant Soriba, aussi sélectionné pour la soutenance individuelle.

Le lycéen originaire de la banlieue de Limoges (Haute-Vienne) fait de la lutte contre l’auto-censure son combat au quotidien, via son engagement dans des associations de quartier. Il en est convaincu : « on peut faire de grandes choses, la première étape c’est d’avoir confiance en soi. Parce que si on ne le fait pas, personne ne va le faire pour nous », estime-t-il.  

« Ces lycéens ont déjà pas mal de ressources (...), il leur manque des derniers déclics, c'est à dire croire en soi et se débarrasser de leur sentiment d'illégitimité », Paul Vinaches, professeur à Sciences Po Toulouse

Beletch, élève en STMG, a surmonté ce sentiment d’auto-censure pour réussir à s’exprimer devant les jurés et ses camarades. « Déjà que les SMTG ont une image négative, je me suis dit que je les représentais et que je devais faire un bon discours », nous explique la lycéenne originaire d’Éthiopie. Même sentiment pour Mariano, qui n’en revient pas d’avoir pu parler de ses ambitions professionnelles « devant autant de monde et dans un lieu aussi important que le Sénat ».

« Ces lycéens ont déjà pas mal de ressources, avec de bons résultats scolaires et on les accompagne déjà toute l’année », souligne Paul Vinaches. « Il leur manque les derniers déclics, c’est-à-dire croire en soi et se débarrasser de leur sentiment d’illégitimité », observe le professeur. 

Donner aux jeunes la possibilité de choisir

Fabien, Beletch, Soriba, Mariano… Comme tous leurs camarades présents au Sénat, ils font partie des milliers d’élèves accompagnés chaque année par l’un des quatre programmesd’égalité des chances du réseau Sciences Po. 

Ceux-ci sont conçus pour identifier, accompagner et soutenir les lycéens issus de conditions sociales modestes à travers les territoires. Tout au long de l’année, les élèves bénéficient d’un soutien académique, de conseils personnalisés et d’une préparation spécifique aux concours d’entrée des IEP en première année.

« On essaie de créer un déclic, en leur demandant s’ils sont sûrs de vouloir être infirmier et pas plutôt médecin » , Rostane Mehdi, directeur de Sciences Po Aix.

« L’objectif de ces programmes, c’est de trouver des pépites et de les amener à choisir leurs études supérieures. Que ce soit Sciences Po, une fac de psychologie, d’histoire, de droit, de médecine… Ils peuvent faire ce qu’ils veulent, du moment qu’on peut leur donner la possibilité de choisir », insiste Rostane Mehdi, directeur de Sciences Po Aix. « On essaie de créer un déclic, en leur demandant s’ils sont sûrs de vouloir être infirmier et pas plutôt médecin », illustre-t-il. « Le simple fait de poser la question peut faire la différence ».

Un « pont entre le secondaire et les études supérieures » comme le décrit Pierre Mathiot, ex-directeur de Sciences Po Lille, qui a déjà été traversé par plus de 70 000 élèves accompagnés par les différents programmes d’égalité des chances des Sciences Po, ces vingt dernières années. « Ça a changé la vie de pas mal d’entre eux », estime Pierre Mathiot. 

Les programmes égalité des chances du réseau Sciences Po en chiffres

  • 70 000 élèves accompagnés depuis plus de 20 ans 
  • Quatre programmes
  • 186 lycées partenaires en France 
  • Près de 500 collèges (accompagnement à partir de la 3e)
  • 235 euros : c’est le coût annuel moyen d’un accompagnement d’un élève au lycée (chiffre valable pour Sciences Po Lille)

 

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