Curtis Mulpas a 19 ans et déjà une belle carrière derrière lui. Le jeune homme ambitieux ne s’en cache pas : « Je suis perpétuellement dans la recherche de buts à atteindre. J’ai envie de me dépasser chaque jour. » avoue-t-il. Dès ses 13 ans, Curtis s’est lancé dans le monde de la cuisine, animé par la passion et propulsé par ses professeurs « la cuisine, c’est une passion : on pense cuisine, on dort cuisine et après, ça vient tout seul. J’ai toujours eu la chance de tomber sur des professeurs qui étaient passionnés par ce qu’ils faisaient et à partir de ce moment-là, on ne décroche plus. » Derrière un air juvénile, ce Belge désormais expatrié en France, a multiplié les expériences et les concours. Après un premier cursus en Belgique, il a intégré la grande école de cuisine Ferrandi, dont il vient tout juste d’être diplômé en BTS. Déjà un premier rêve réalisé pour le cuisinier : intégrer une grande et prestigieuse école française. Ses objectifs ne s’arrêtent pourtant pas là. Son but ultime ? Devenir un jour, premier ouvrier de France.
Entre le déracinement et la volonté de devenir cuisinier
L’exigence pour Curtis, demeure un combat de tous les jours. La cuisine professionnelle, réputée pour être un milieu difficile, a mis à rude épreuve sa résistance mentale. Très tôt, il a dû quitter sa famille pour suivre son apprentissage, puis partir en France, il y a deux ans, continuer sa formation. Mais pour lui, la cuisine prime sur le reste : motivé par son désir de réussite et son amour du métier, il résiste et s’épanouit « La passion revient toujours au-dessus, je me dis que je dois continuer, parce qu’un jour, j’espère que ça paiera. ». Un déracinement comblé par une autre famille, celle de la cuisine. L’arrivée en France s’est très bien passée pour lui, désormais il côtoie des collègues et des camarades tout aussi intéressés que lui. Il semble heureux de partager sa passion : sur un ton rieur, il avoue : « on n’arrête pas de parler de cuisine. »
« Chercher la diversité culinaire », avant de se précipiter vers les métiers de la cuisine
Au premier abord, cela peut surprendre : avec un regard mature et critique, Curtis analyse les jeunes de son âge. Ils sont nombreux à vouloir brûler les étapes, « quand on voit des jeunes parfois, qui ouvrent des restaurants, on a envie de leur dire qu’ils ne sont pas encore prêts » concède-t-il. La formation en cuisine reste primordiale et doit se faire sur la durée. Il faut « chercher la diversité culinaire […] continuer à rencontrer des personnes et des cuisines différentes pour nous permettre de créer la nôtre. » Pour lui, « il faut aller au bout des choses ». Il aborde les métiers de la cuisine comme un défi quotidien à relever : « c’est un métier où il faut être patient, où il faut s’intéresser, reproduire, apprendre de ses erreurs et se relever pour faire mieux chaque jour. »
Plat gagnant du concours « Jeunes Talents, Maître Restaurateur » : turbot cuit sur arête, croute génoise en deux couleurs, navet boule d’or en purée, carottes et beurre blanc au safran.
© J-L.Vandevivière
Valoriser la cuisine à travers un autre regard
Outre la technique, Curtis réfléchit et porte des valeurs culinaires. Il a cofondé en 2015, la start-up Auparager, avec pour but de réduire le gaspillage dans la cuisine. Il est catégorique, pour lui « on gaspille trop, on fait beaucoup de pertes pour toujours avoir une forme d’excellence. » Le concept consiste à récupérer les invendus pour les retravailler. Curtis a quitté le projet il y a quelques mois, pour encore une fois « [s’] investir plus dans la cuisine », mais il n’oublie jamais ses valeurs : « dans ma cuisine, tous les jours j’essaye de réduire le gaspillage, c’est important de respecter un produit de A à Z. » Le produit, c’est pour lui la base. Il le cajole, le comprend et le respecte, « il a une histoire : on sait qu’il a poussé, qu’il a été arrosé chaque jour », dit-il avec sincérité. Il va au contact du produit et s’organise en fonction. Le jour d’un concours, il raconte : « je suis allé chercher tous les produits chez un maraicher avec qui je m’entends très bien. Ce matin-là, il avait des petits navets boule d’or, ce qui n’était pas vraiment prévu dans la recette ! Le produit était tellement magnifique, qu’en tant que cuisinier j’ai été inspiré. »
La cuisine : des passionnés et de la persévérance
Curtis parle de la cuisine avec simplicité : un métier de passionnés, où il faut gravir les échelons. À chaque fois qu’il aborde les événements de sa vie culinaire, le mot « chance » revient presque toujours. Une forme d’humilité, révélatrice d’un jeune homme en qui on croit, et qui le rend bien. Aujourd’hui, il travaille au restaurant le Violon D’Ingres, sous la tutelle de Christian Constant [ndlr : grand chef et membre du jury de Top Chef], son « mentor ». Leurs profils se croisent : tous deux sont partis tôt de chez eux, tous deux travaillent dur, tous deux n’oublient pas ce qu’est, d’abord, la cuisine : « faire plaisir et faire découvrir. » Le talent du jeune Curtis ne passe pas inaperçu. En février dernier, sous le parrainage de Norbert Tarayre, il a remporté la sixième édition du concours « Jeunes Talents, Maître Restaurateur ». Les concours pour lui, deviennent une habitude. Formateurs, ils apportent une forme de reconnaissance et permettent de « s’améliorer ». Un jeune homme qui ne s’arrête jamais de travailler, dont on risque de beaucoup entendre parler.