D’origine italienne et passionné par la culture du pays, David s’est orienté en licence LLCER italien à la faculté de Lettres de Nancy. Actuellement en deuxième année, il est déjà titulaire d’une licence LEA, mais il est convaincu que ce nouveau diplôme lui correspond mieux.
À 24 ans, le jeune homme a des projets plein la tête, qu’il compte bien accomplir grâce à sa persévérance. Né grand prématuré, David est atteint d’un handicap moteur, plus précisément d’une infirmité motrice cérébrale (IMC). Même s’il parvient à se déplacer debout dans des espaces restreints, l’étudiant dépend de son fauteuil roulant, pour se rendre à l’université ou pour pratiquer une activité sportive.
Mais, ce n’est pas cela qui l’empêche d’avoir une vie normale. Malgré quelques difficultés rencontrées au cours de son parcours, David fait de son handicap sa force. Il nous raconte.
Ne jamais baisser les bras face aux difficultés
La scolarité de David n’est pas de tout repos, et ce, dès le plus jeune âge. « En maternelle, la directrice ne voulait pas que je vienne à temps complet, sous prétexte que je n’étais pas capable de tenir toute une journée de cours », indique le jeune homme.
Mais les dures épreuves de David ne font que commencer. En primaire, il intègre un centre spécialisé pour les personnes en situation de handicap, duquel il garde quelques traumatismes. « J’aurais voulu grandir dans un environnement où je ne me sens pas différent des autres », déplore-t-il. « Je ne me sentais pas bien du tout là-bas. »
« Certains professeurs ne comprenaient pas forcément mon handicap et ils ne s’y intéressaient pas spécialement »
Au collège, c’est à des problèmes d’aménagement qu’il est confronté. Sa vie se voit bousculée par l’absence d’un ascenseur dans son collège de secteur. « J’ai dû partir dans un établissement où je ne connaissais personne, mais je ne regrette pas, car le collège avait une bonne réputation et mes profs étaient vraiment bien », avoue David. Pourtant, c’est aussi à ce moment que les discriminations commencent. « Alors, ça roule ? » est la blague mal intentionnée qu’il entend le plus souvent. Sûr de lui, il ne laisse rien passer. « Dans la vie de tous les jours, je n’ai jamais laissé qui que ce soit me manquer de respect », avance le jeune homme avec fierté.
Arrivé dans le secondaire, sa condition physique est d’entrée remarquée et une conseillère d’orientation lui fait comprendre que la seconde générale serait trop difficile pour lui. Déterminé, il ne se laisse pas abattre et entre en classe de première ES. Alors que David pense être face à un public plus mature, les attaques ne s’amenuisent pas au lycée. Pire encore, elles sont même plus ancrées. « Pendant trois ans, j’ai été harcelé et rabaissé par un de mes camarades de classe », explique l’étudiant.
Et côté enseignants, les choses ne s’arrangent pas : « certains professeurs ne comprenaient pas forcément mon handicap et ils ne s’y intéressaient pas spécialement », confie David. Le jeune homme a d’ailleurs souvent été mis de côté. « En seconde, j’ai été écarté d’un voyage à Rome car, selon les profs, j’allais avoir des difficultés d’accès », regrette l’étudiant. Mais, hors de question de ne pas tirer profit de ce temps libre. Ni une ni deux, David part de son côté en Italie pour rejoindre sa famille.
Malgré tout, l’étudiant n’a jamais baissé les bras face aux difficultés. Ces dernières lui ont même permis de forger son caractère et d’atteindre ses objectifs. « Vous verrez, les enfants comme ça sont des battants », a assuré le docteur aux parents de David à sa naissance. Les accomplissements du jeune homme n’ont fait que confirmer ses propos.
Dyspraxie et IMC : un quotidien parsemé de défis
Atteint de dyspraxie, la gestuelle de David est affectée et les tâches plus minutieuses sont pour lui plus compliquées à réaliser. De ce fait, il est accompagné par une assistante de vie sociale pendant toute sa scolarité, afin que cette dernière l’aide, par exemple, à écrire. Mais, arrivé à la fac, il en décide autrement. « J’avais besoin de gagner en autonomie et d’organiser mes cours et mes révisions seul », avance-t-il. Le jeune homme perçoit alors l’entrée dans l’enseignement supérieur comme un nouveau souffle. « Je peux dire que je vis actuellement une scolarité assez normale », admet David. « Sans AVS, j’écris tous mes cours à l’ordinateur et je n’ai besoin d’aucun aménagement particulier, hormis le tiers temps dont je bénéficie pour les examens », ajoute-t-il.
Un aménagement des épreuves qui consiste à accorder plus de temps du temps aux personnes en situation de handicap, dyslexiques ou dyspraxiques.
Pourtant, ses journées peuvent quelquefois être chamboulées. Cette année, c’est sa dyspraxie qui en a souffert. « Un jour, un de mes professeurs de licence nous a demandé de fermer tous nos ordinateurs pour le cours », raconte le jeune homme. « Tout le monde l’a fait sauf moi, et quand je lui ai expliqué pourquoi, il n’a pas compris et m’a tout de même demandé de le fermer. » Résultats des courses : l’étudiant est resté trois heures en amphi sans pouvoir prendre de notes.
« En situation de handicap, on dépend des ascenseurs, donc s’ils tombent en panne, c’est un peu compliqué »
Mais ce n’est pas tout. David a déjà raté certains cours par manque d’accessibilité. En effet, si l’ascenseur ne fonctionne pas, il n’a aucune autre façon d’y accéder. Par chance, l’étudiant parvient à se déplacer doucement sans sa chaise roulante. « Pour des examens ou des cours plus importants, j’ai souvent dû faire appel à un ami qui a été contraint de sortir du cours, pour venir m’aider à porter mon fauteuil pendant que je montais les marches », confie le jeune homme. « En situation de handicap, on dépend des ascenseurs, donc s’ils tombent en panne, c’est un peu compliqué », souligne-t-il.
Et le problème des ascenseurs affecte aussi les exercices d’évacuation en cas d’incendies. Comment David sort de l’établissement s’il n’a pas le droit d’emprunter l’ascenseur dans ces situations ? « Les écoles n’y sont pas préparées », reconnaît-il. « Une fois, tous les étudiants sont partis par les escaliers et on m’a demandé de rejoindre une salle pour les personnes en situation de handicap, à l’autre bout du bâtiment. Je me suis retrouvé seul avec une autre personne, au 3e étage, et nous devions attendre que les pompiers viennent nous chercher par la fenêtre », raconte-t-il. Heureusement, il a appris à vivre avec ces obstacles du quotidien, mais il espère que les choses changeront à l’avenir.
« Le sport m’a sauvé à plusieurs reprises »
Si le sport est connu pour ses bienfaits sur la santé physique et mentale, pour David, il est une sorte d’élément libérateur. « Le sport m’a permis de prendre confiance en moi et de me libérer l’esprit », indique le jeune homme, le sourire aux lèvres. Dyspraxie, IMC, discriminations, dépressions… L’étudiant réussit à sortir la tête de l’eau grâce à sa passion pour l’handiathlétisme, qu’il pratique cinq fois par semaine. « Le sport m’a permis de prendre confiance en moi quand j’étais au lycée », avoue le jeune homme. « J’ai pu me dire que j’ai du potentiel et que je suis capable de faire des choses que les personnes qui ne sont pas en situation de handicap peuvent faire », renchérit-il, fièrement.
Même si David parcourt déjà 55 km par semaine avec son fauteuil d’appartement, il souhaite aller plus loin : « j’aimerais en avoir un dédié, qui permet de participer aux compétitions et qui est plus rapide. » Se lancer dans une carrière sportive ? Poursuivre dans les langues ? Il n’en est pas certain et se laisse vivre au jour le jour.
En attendant, il continue ses études et écrit même un livre, à travers lequel il souhaite changer le regard porté sur le handicap et aider les personnes dans la même situation que lui à s’épanouir. « Ne laissez pas votre entourage définir qui vous êtes et avancez sans crainte vers vos objectifs », encourage le jeune homme. « Si quelque chose vous anime, continuez à y croire et ne vous fiez pas à ce qu’on vous dit », conclut-il.