Union étudiante : « Les étudiants veulent un avenir digne, vivable et solidaire »

Alors que la crise du logement et la précarité frappent de plein fouet les étudiants en cette rentrée, l’Union étudiante alerte sur l’urgence de la situation et détaille ses priorités.
Publié le
Lecture
Trouver mon école
Quelle école est faite pour toi ?
Prends 1 minute pour répondre à nos questions et découvrir les écoles recommandées pour toi !
Trouver mon école (1min 🕓)
© Union étudiante / Hugo Neveux

Retards dans le versement des bourses, loyers en hausse, difficulté pour se nourrir : pour l’Union étudiante, la rentrée se déroule sous le signe de la précarité. Depuis sa création en avril 2023, le syndicat arrivé en tête des élections Crous regroupe plusieurs structures locales au sein des villes universitaires de l’Hexagone et se présente comme le relais des préoccupations étudiantes.

L’Union étudiante met en avant trois priorités : lutter contre la crise du logement, améliorer le système de bourses et instaurer un revenu d’autonomie. Pour se faire entendre, l’organisation appelle à une nouvelle mobilisation ce jeudi 25 septembre. Rencontre avec Éloïse Lefebvre Milon, étudiante en M1 Géographie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et co-secrétaire générale de l’Union étudiante.

Comment l’Union étudiante évalue-t-elle la situation du logement étudiant en cette rentrée ?

On constate un réel problème sur le marché du logement. Les étudiants galèrent systématiquement à trouver leur perle rare, en grande partie à cause du manque de logements disponibles. Des constructions ont été annoncées par le CROUS, mais on n’a toujours pas de chiffres précis sur ce qui a réellement été lancé. On déplore que cela ne va pas assez vite.

Puis, le logement est le premier poste de dépense des étudiants. Il faut réussir à en trouver un qui soit à la fois accessible financièrement et décent. Beaucoup se retrouvent dans des logements trop petits, insalubres, infestés. C’est un véritable parcours du combattant.

Quelles sont les mesures d’urgence que vous demandez, dès cette rentrée, pour éviter que des étudiants dorment dehors ou abandonnent leurs études ?

Il faut garantir le versement des bourses. Cette année, les notifications définitives de bourse ont pris beaucoup de retard à cause d’un manque de personnel et d’un changement de logiciel au CROUS. De nombreux étudiants éligibles n’ont pas pu percevoir leur bourse à temps. Résultat : certains ont dû avancer leurs frais d’inscription ou la CVEC (alors qu’ils en sont exonérés) et ne peuvent pas payer leur loyer de septembre.

Il faut aussi revaloriser les montants des bourses, qui sont largement insuffisants. Le plus haut échelon ne couvre même pas la moitié du seuil de pauvreté. On demande aussi un délai pour le paiement des loyers, afin de ne pas obliger les étudiants à choisir entre se nourrir ou se loger.

Que racontent les étudiants sur leurs difficultés à se loger ?

Les étudiants nous expliquent qu’ils ne trouvent pas de logement à cause des loyers trop élevés ou parce que les propriétaires demandent plusieurs mois de loyer en avance, ce qui est impossible pour la plupart. Certains dorment sur le canapé d’un ami quand d’autres restent chez leurs parents et font plusieurs heures de train pour aller en cours.

Il y a des villes, comme Paris ou Rennes, où la situation est particulièrement tendue. Les logements du CROUS ne sont accessibles qu’aux étudiants ayant les échelons de bourse les plus élevés. Si on est échelon 3 ou 4, on ne peut même pas être examiné pour l’attribution d’un logement. Il y a trop peu de places disponibles par rapport au nombre d’étudiants. Même ceux qui cumulent bourse et job étudiant n’arrivent pas à se loger décemment.

Vous proposez un revenu d’autonomie de 1 288 € par mois. Celui-ci serait destiné à tous les étudiants ou seulement les plus précaires ?

Il serait destiné à tous les étudiants, car chacun doit pouvoir vivre de façon autonome, sans dépendre de ses parents. Aujourd’hui, le calcul de la bourse est basé sur les revenus parentaux, ce qui est injuste, surtout pour des jeunes majeurs.

Ce revenu d’autonomie remplacerait les bourses, mais serait cumulable avec d’autres aides comme les APL. Il serait financé en partie par le budget actuel des bourses et par la suppression d’avantages fiscaux qui profitent surtout aux familles les plus aisées. Ce serait une redistribution plus équitable.

Certains diront que c’est injuste de verser la même somme à un étudiant aisé et à un étudiant précaire…

Justement, ce revenu permettrait de réduire les inégalités, pas de les aggraver. Quand on voit que même les étudiants avec les plus hauts échelons de bourse peinent à s’en sortir, le revenu d’autonomie garantirait à tous et toutes un niveau de vie décent, au-dessus du seuil de pauvreté.

Est-ce qu’il vous arrive d’organiser des distributions alimentaires ?

À Rennes, par exemple, il nous arrive d’organiser des distributions en lien avec la Banque Alimentaire. On ne travaille pas directement avec Cop1 ou Linkee, mais on redirige les étudiants vers ces associations quand elles existent localement.

🛠️ Les revendications prioritaires de l’Union étudiante

Face à une précarité étudiante grandissante, l’Union étudiante avance un socle de revendications : investir massivement dans l’enseignement supérieur public, mettre fin aux politiques de sélection dans certaines formations, construire en urgence 300 000 nouveaux logements, revaloriser les bourses et instaurer un revenu d’autonomie.

À cela s’ajoutent deux mesures plus immédiates : la suppression de la CVEC et le gel des loyers CROUS (+3,5% de hausse de loyer depuis la rentrée).

« On refuse que l’université devienne un lieu d’exclusion sociale, où seuls les étudiants les plus favorisés peuvent rester. Aujourd’hui, l’université exclut ceux qui n’ont pas les moyens de payer, qui subissent la sélection en licence ou en master, ou encore qui ne trouvent pas de logement », défend Eloïse Lefebvre Milon.

L’Union étudiante a appelé aux mobilisations du 10 et du 18 septembre. Quel bilan en tirez-vous ?

C’était très impressionnant. Le 10 septembre, c’était à peine la rentrée, et il y avait déjà de nombreux étudiants dans la rue. Le 18, ça a continué. Il y a une vraie colère chez les jeunes, une volonté de s’organiser dans leurs établissements pour dire stop à la politique d’Emmanuel Macron.

On appelle à une nouvelle journée de mobilisation ce jeudi. Même si l’intersyndicale aura son rendez-vous avec le Premier ministre Sébastien Lecornu aujourd’hui, nous, on pense qu’il ne faut pas attendre grand-chose de celui qui a été nommé pour appliquer l’austérité et augmenter le budget de l’armée. Pour nous, la solution viendra du rapport de force car c’est dans la rue et dans les universités qu’on obtiendra des avancées. Et si on veut vraiment que ça change, ça passe par le départ de Sébastien Lecornu et même du président de la République, dont la politique a été rejetée à trois reprises dans les urnes.

On veut massifier les assemblées générales, faire des blocages, sensibiliser dans les universités. On rappelle que la précarité étudiante n’est pas une fatalité, que la galère n’est pas une étape normale de la vie. Il faut changer de modèle universitaire et de société. L’écologie aussi est sacrifiée dans les politiques actuelles. Les étudiants veulent un avenir digne, vivable, et solidaire.

© Union étudiante / Hugo Neveux  

Pour vous, quel rôle doit jouer l’université ?

L’université doit rester un lieu d’émancipation, ouvert à toutes et tous, peu importe les revenus ou l’origine sociale. C’est pour ça qu’on se mobilise aujourd’hui, et qu’on continuera tant que ces politiques d’austérité existeront.

Comment expliquer les difficultés rencontrées par les jeunes aujourd’hui ?

Le niveau de précarité des étudiants et la mise au pas de la jeunesse par les politiques macronistes expliquent beaucoup. Ce climat anxiogène commence dès le lycée, avec Parcoursup qui est une vraie tombola : les lycéens angoissent sur leur avenir.

Puis à l’université, il faut trouver un logement, payer les frais d’inscription, travailler à côté, se nourrir… alors que nos droits étudiants reculent (droit à la compensation, au rattrapage, ou encore droit d’être absent sans perdre sa bourse). Ce n’est pas un manque de motivation qui cause l’échec, ce sont des conditions devenues insoutenables.

La question de la Palestine et du conflit mobilise beaucoup aussi. On demande la rupture des partenariats entre nos universités et les entreprises impliquées dans l’occupation, et l’accueil des étudiants palestiniens de Gaza inscrits en France.

Comment conciliez-vous engagement syndical et études ?

Je suis engagée depuis la L1 et j’ai toujours réussi à travailler et valider mon année. Dans notre syndicat, chacun donne à la hauteur de ses moyens. Même venir une fois toutes les deux semaines, tenir une table d’accès aux droits ou partager un post sur les réseaux, c’est déjà contribuer. Ce sont ces petites actions cumulées qui font vivre le syndicalisme.

 

Trouve ton diplôme
en 1 min avec Diplomeo ! Trouver mon école

Plus de contenus sur Études et vie de campus

Toutes les actualités