De nouveaux chiffres qui assombrissent un tableau déjà alarmant sur la situation des étudiants en France. Après une rentrée universitaire marquée par une explosion de la précarité étudiante, l’Union étudiante publie, mercredi 29 novembre, son enquête* sur le mal-logement étudiant.
Le résultat est "aussi complet qu’accablant", déplore l’Union étudiante, dans un communiqué. Selon l’enquête, 87 000 étudiants ont entamé leur année universitaire 2023-2024 sans logement. Et plus d’un étudiant sur deux (soit plus d’1,5 millions de jeunes) est mal logé. Des chiffres symptomatiques d’une "société inégalitaire", dénonce le syndicat, qui réclame des mesures urgentes contre la "souffrance des étudiants". État des lieux.
🏚️ L'UNION ÉTUDIANTE ALERTE SUR LE MAL-LOGEMENT ÉTUDIANT 🏚️
Nuisibles, insalubrité, nuisances sonores, habitat exiguë ou encore sans-abrisme : plus d'1 étudiant·e sur deux est mal-logé·e en France.
Retrouvez le détail de notre enquête ⤵️ https://t.co/0ZSJwQBpUJpic.twitter.com/eTTdUDd1IM
— L’Union Étudiante (@unionetudiante_) November 29, 2023
Le sans-abrisme étudiant, un fléau en constante augmentation
Si quitter le cocon familial est la clé de l’autonomie et de l’émancipation pour bon nombre d’étudiants, ils sont de moins en moins nombreux à pouvoir se le permettre. "29,5% des étudiants sont en situation de cohabitation contrainte et souffrent de l’absence de domicile personnel", estime l’enquête.
Un phénomène qui implique souvent des trajets à rallonge pour se rendre sur le lieu d’études : près de 20% des étudiants qui vivent chez leurs parents ont plus d’une heure de trajet, contre 3,2% pour les étudiants vivant dans un logement indépendant.
Pour ceux qui n’ont pas d’autre choix que de partir de chez eux, certains optent pour le système D. Sur les 87 000 étudiants sans solution de logement durable en novembre, la majorité d’entre eux ont été logés chez des amis (55%) ou chez des membres de la famille (26%), révèle l’étude. D’autres se sont rabattus sur des solutions plus urgentes, comme dormir dans leur voiture (3,5%) ou en Airbnb (5%). Un sans-abrisme "difficile à quantifier", qui "augmente d’année en année", alerte l’Union étudiante.
Jusqu’à 64 étudiants pour 1 logement Crous à Paris
Cette difficulté à trouver son nid résulte d'une crise sans précédent du logement en France, qui touche l'ensemble de la population. Pour les étudiants, cela se traduit par une faible disponibilité des biens, dont "l’offre a diminué de moitié entre 2018 et 2023", estime le syndicat.
"A cela s’ajoute une trop faible construction de logements sociaux et de résidences universitaires", complète-t-il. Dès lors, le CROUS "ne peut remplir pleinement son rôle", constate encore l’Union étudiante, pointant une "inaction de l’Etat et des collectivités". En effet, "on compte en moyenne 16 étudiants pour 1 logement Crous", estime l’étude. Un chiffre qui grimpe dans les territoires tendus, pouvant aller jusqu’à 64 étudiants pour 1 logement Crous à Paris.
Côté marché locatif privé, l’accès au logement est, lui, rendu complexe par les prix des loyers, qui ne "cessent de s’envoler en l’absence d’une politique volontariste du gouvernement pour encadrer les loyers à la baisse", selon l’Union étudiante. Dans un contexte d’inflation, les étudiants ne peuvent pas assumer des loyers trop importants, qui représenteraient, en 2020, 70% de leur budget mensuel.
1 étudiant sur 8 estime que son logement est indécent
Quant à la qualité du logement, 1 étudiant sur 8 estime que son logement n’est pas décent. Sans considérer leur habitat comme indécent, plus de 6 étudiants sur 10 sont, eux, exposés à des nuisibles. Un décalage de perception de la qualité de vie qui traduit une tendance des étudiants à "relativiser" leur précarité, souligne l’étude.
Fragilisés financièrement, les étudiantspréfèrentunfaible loyerà un logement décent, près de 70% des étudiants payant moins de 300 euros de loyers témoignant d’au moins une nuisance. Ainsi, les étudiants vivant seuls sont le plus souvent exposés à des nuisances sonores (70%) et à une mauvaise isolation thermique (60%).
Dans ce contexte, 18% des étudiants interrogés dans l’enquête considèrent que le logement a un impact"négatif ou très négatif" sur leurs études. De plus, 63% des étudiants n’ont pas d’espace de travail personnel et 48,8% d’entre eux n’ont pas accès à un réseau internet viable, selon l’étude. Autant de conditions défavorables qui empiètent sur leur réussite, alors même que les logements étudiants sont plus propices aux nuisances, et que le "travail en distanciel continue d’être utilisé et favorisé dans de nouvelles universités", souligne l’étude.
L’Union étudiante réclame des mesures fortes
Face à cette situation alarmante, l’Union étudiante préconise plusieurs pistes pour sortir les étudiants de la précarité. A commencer par la création en urgence de "150.000 logements CROUS ou à caractère social" ; le blocage nationale des loyers des logements étudiants (CROUS et privé) ; une augmentation de 10% des APL et la mise en place d’un revenu d’autonomie étudiant de 1158 euros par mois.
D’autre part, le syndicat demande un plan de construction pluriannuel de 600 000 logements CROUS pour 2035. Il réclame, en outre, une dotation de 5 milliards d’euros pour la rénovation thermique des passoires énergétiques, ainsi que l’extension du système de bourses aux étudiants étrangers, particulièrement vulnérables au mal-logement.
*Enquête menée du 24 septembre au 25 novembre auprès de 8.000 étudiants inscrits sur les principaux campus de France. Les sondés ont répondu via un questionnaire en ligne ou papier.