En coulisses, quelques minutes avant de monter sur scène, chacun savoure le moment. Car si la pression monte à mesure que la salle se remplit dans un joyeux brouhaha, pas question pour les six lycéens finalistes du concours Eloquentia@HEC 2024 de se laisser déstabiliser. Et pour cause : aucun d’eux n’imaginait se retrouver un jour au Bataclan pour défendre leur point de vue devant 900 personnes.
Mercredi 2 octobre, Dino, Fanny, Martin, Mariam, Chiara et Josaphat se sont disputés, sur cette scène mythique et chargée d’histoire, à Paris, le titre du meilleur orateur lycéen de France. Tour à tour, pendant près d’une heure et devant un public survolté, ils ont pris la parole sur des sujets imposés.
« Il y a autant de façons de faire un bon discours que d’orateurs »
« Faut-il être moderne ? » ; « Nos émotions sont-elles inavouables ? » et « Faut-il jouer avec les mots ? ». Les participants de 16 à 18 ans, venus des quatre coins de la France, avaient deux semaines pour aiguiser leurs arguments, travailler leur posture et leur respiration pour être au point le jour J. Un travail en amont indispensable pour convaincre et transmettre des émotions, tout en restant soi-même.
« Un discours, c’est 50 % de forme et d’entraînement, et 50 % de sincérité, de volonté de faire passer son message », nous explique Martin. Pour défendre qu’il ne faut pas dévoiler ses émotions, au risque d’y laisser des plumes, le jeune toulousain a travaillé 25 heures sur l’écriture de son discours de 7 minutes.
À côté du texte, chacun apporte son style : humour, slam, théâtre… tous les moyens sont bons ! « Certains utilisent très peu de mots, d’autres parlent beaucoup et très vite… il y a autant de façons de faire un bon discours que d’orateurs », résume Martin. Pour Chiara, qui a vaincu sa timidité avec l’art oratoire, « le fait d’être soi-même est primordial ». « L’éloquence, ça permet de s’assumer et de prendre confiance en soi », ajoute la jeune femme qui a slamé une partie de son discours pour défendre son amour pour les mots.
« En tant qu’ado, c’est hyper rare d’être écouté »
Avant de monter sur la scène du Bataclan, les finalistes ont franchi une à une les étapes du concours lancé en 2018 par l’association Eloquentia. En juillet dernier, 120 candidats avaient été sélectionnés, sur 500 dossiers, pour participer au « summer camp » d’HEC. Une immersion unique sur le campus de l’école de commerce, avec un coaching intense et des sessions éliminatoires, le tout dans une ambiance bienveillante.
« C’était l’une des meilleures expériences de ma vie : on s'entraidait avec nos discours, on avait des ateliers super intéressants, sans esprit de compétition… Ce n’était pas du travail, c’était du plaisir », se souvient Martin. « Au-delà d’avoir rencontré des personnes super, avec qui je partage une passion, j’ai appris à bien me positionner pour m’exprimer, parler fort sans tirer sur mes cordes vocales, capter l’attention… » égrène-t-il.
Autant de lycéens venus d’horizons différents qui ont « acquis des compétences et une dynamique de vivre ensemble qui leur servira toute leur vie, personnelle comme professionnelle », explique Hélène Bermond, chargée du programme égalité des chances à HEC. « Ça ouvre leur champ des possibles », ajoute-t-elle.
À la fin de la soirée, c’est Martin qui sera sacré meilleur orateur lycéen de France, suivi par Josaphat et Mariam. S’il ne « réalise pas encore », le jeune toulousain est certain d’une chose : comme ses camarades, il gardera cette expérience comme un souvenir « hors du commun ». « En tant qu’ado, c’est hyper rare d’être écouté, par des personnes plus âgées en particulier », renchérit Chiara. « Pouvoir défendre nos convictions dans ces conditions, ça nous donne une résonance, de la confiance en soi », résume-t-elle.
