Un vêtement unique, pour venir à bout des problèmes dermatologiques. C’est le pari que s’est lancé Barbara Desclaux, 25 ans, avec la création de Deuxième peau. Un projet ambitieux dont elle s’occupe, pour le moment, seule et à plein temps.
Marque de prêt-à-porter ingénieuse, Deuxième peau contribue à protéger la peau des personnes victimes de différentes maladies dermatologiques, comme la dermatite atopique, l’eczéma ou encore le psoriasis. Rencontre avec cette jeune diplômée, lauréate du Prix Pépite, qui récompense les étudiants auto-entrepreneurs sur leurs projets innovants.
Du prix Pépite à l’entrée dans la cour des grands
Pendant ses études, Barbara oscille entre le textile et le design. Après un baccalauréat technologique STD2A (Sciences et technologies du design et des arts appliqués) à Lyon, elle opte pour des études de design dans la capitale. Grâce à plusieurs stages à Paris et Londres, elle se familiarise avec la lingerie et le modélisme. Puis, dans le sillage de sa vie estudiantine à ENSAAMA Olivier de Serres, établissement niché dans le 15e arrondissement de Paris, elle participe à un prix en partenariat avec le mobilier national.
« L’idée était de revaloriser la laine française avec le campus des métiers d’arts, qui rassemble plusieurs écoles d’arts et de design à Paris », affirme Barbara Desclaux. « J’ai par la suite été lauréate de ce concours, avec la mention fabriquée en laine ». Ce prix donne le tempo pour la suite de ses études : son projet prend racine et s’inscrit dans une continuité entre l’école et son parcours post-diplôme. « J’ai rencontré des personnes d’HESAM Entreprendre, puis le programme Pépite », confirme-t-elle.
« Le prix Pépite est extrêmement boostant et cela m’a confortée dans l’idée que j’avance dans la bonne direction »
En 2023, Barbara remporte le prix Pépite (Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat) au niveau régional et national. Une récompense bienvenue et dont la cérémonie s’est très bien déroulée. « L’impact que peut avoir l’entrepreneuriat est incroyable », se réjouit-elle, avant de poursuivre : « Cela valide les objectifs atteints et les hypothèses émises autour de ce projet ». Selon la lauréate, « le prix Pépite est extrêmement boostant et cela m’a confortée dans l’idée que j’avance dans la bonne direction ».
Aujourd’hui, elle est diplômée d’un Diplôme supérieur d’arts appliqués (DSAA). Dans la continuité du Prix Pépite, Barbara développe son projet d’ampleur à la Station F, complexe parisien de starts-up, au sein de la Pépinière Schoolab. « Il s’agit d’un même accompagnement qu’à l’HESAM, avec une phase plus avancée du projet avec des experts, et une orientation plus tech », explique-t-elle. Grâce à des bourses et un accompagnement adapté, son projet Deuxième peau est né. « Je me suis rendu compte que c’était possible à notre échelle, en tant qu’étudiant, de réaliser quelque chose qui nous tient à cœur ».
Répondre à une pathologie qui gangrène le quotidien
Les maladies liées à la peau peuvent être de véritables plaies pour les patients et devenir très impactantes au quotidien. « Cela se traduit par des rougeurs, qui peuvent empêcher de dormir. Cela est aussi douloureux lorsqu’on prend une douche », prévient Barbara. « Je suis moi-même patiente depuis toute petite de la dermatite atopique en terme médical », ajoute-t-elle. Selon elle, « jusqu'à 78% des adultes atteints d'une forme de la maladie allant de modérée à grave n'éprouvent pas d'améliorations significatives en dépit des traitements immunosuppresseurs reçus ou à base de cortisone », d’autant que la souffrance autour de cette maladie engendre des difficultés physiques ou mentales.
À partir de ce constat et de son expérience personnelle, elle décide de poursuivre l’aventure de ce qui était, initialement, un projet étudiant. Son expertise sur le sujet, acquise lors de ses études, sert de point de départ. « Après avoir interrogé des gens sur leur parcours thérapeutique, j’en ai déduit que beaucoup de patients sont dans cette recherche infinie de solutions », raconte Barbara. « Je me suis rendu compte qu’il y avait des fibres assez intelligentes pour aider la peau et que le vêtement est déjà une seconde peau de façon générale », ajoute-t-elle.
« Je veux faire de mon vêtement un produit non stigmatisant, tout en l’arborant comme un accessoire de mode »
La matière textile de ce type de produit se compose d’une fibre d’origine cellulosique et une autre qui est protéinique. Des éléments qui, selon la créatrice, favorisent un microcosme entre la peau et le vêtement sur deux aspects majeurs. D’une part, « l’objectif est d’apporter une protection mécanique à la peau : les zones lésées que l’on va avoir tendance à gratter toute la journée avec nos mains sales sont protégées », glisse-t-elle. D’autre part, le vêtement vise à protéger « de toutes les interactions mécaniques qu’il peut y avoir de l’extérieur, ce qui va diminuer l’inflammation », renchérit la fondatrice de Deuxième peau.
Apaisement et compression, tels sont les maîtres mots pour décrire sa marque de prêt-à-porter. « Le vêtement amène du compressif et une limite à une peau qui est en crise », relate-t-elle. « Il permet aussi de cacher des zones que l’on n’a pas envie de montrer et de se décharger des commentaires type “avez-vous utilisé telle ou telle crème” qui peuvent être pesants à la longue ». Pour elle, l’esthétique a aussi une dimension importante. « Je veux faire de mon vêtement un produit non stigmatisant tout en l’arborant comme un accessoire de mode ».
Des premiers retours positifs, sur fond d’optimisme
Le travail de Barbara a porté ses fruits : la jeune diplômée reçoit de premiers retours encourageants. « Les clients m’ont dit que cela apporte du confort et des hypothèses scientifiques que j’avais émises ont été confirmées », concède-t-elle, confiante et ravie. « Il reste, bien sûr, quelques points à améliorer et je reste à l’écoute des principaux intéressés ».
« Je sens que le projet me correspond, que je suis à ma place, car ce que je propose rend service »
Il s’agit d’un terme qui désigne la mise en place d’un projet entrepreneurial, au sein même d’une entreprise. Les salariés peuvent, en interne, porter des projets sans avoir besoin de quitter la société.
Bien que la jeune entrepreneuse ait ressenti des doutes par le passé, elle se sent aujourd’hui confiante. Au départ, elle s’imagine faire de l’intrapreneuriat au sein d’une organisation. Elle choisit finalement d’avoir sa propre micro-entreprise. « Je dépose actuellement mes statuts qui sont sur le point d’être validés par une SASU [Société par actions simplifiée unipersonnelle] », précise-t-elle. « Je sens que le projet me correspond, que je suis à ma place, car ce que je propose rend service. Faire un produit qui répond à un besoin et s’assurer de la nécessité de ce besoin, c’est essentiel ».
Barbara reste optimiste pour la suite et a le regard tourné vers l’avenir. Si elle est toujours seule à s’occuper du projet, la question de l’embauche de plusieurs salariés dans le cadre de sa micro-entreprise est sur la table. « D’ici les prochaines années, j’aimerais être une marque de Pierre Fabre [groupe pharmaceutique et dermo-cosmétique], lancer des partenariats avec d’autres marques et surtout être diffusée dans les hôpitaux et prescrits par les médecins », conclut-elle.