Média

Prix Irène Joliot-Curie 2023 : la distinction Jeune femme scientifique récompense un trio pour la première fois

Depuis 2001, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, l’Académie des sciences et l’Académie des technologies récompensent chaque année plusieurs chercheuses avec les prix Irène Joliot-Curie. Cette année, la distinction Jeune femme scientifique rassemble trois lauréates, synonyme d’une « science collective ».
Publié le
Lecture
Trouver mon école
Quelle école est faite pour toi ?
Prends 1 minute pour répondre à nos questions et découvrir les écoles recommandées pour toi !
Trouver mon école (1min 🕓)
https://f.hellowork.com/edito/sites/5/2024/03/N°-DE-FICHIER-36618579-4.jpg
© Diplomeo. Les trois lauréates du Prix Jeune femme scientifique. De gauche à droite, Virginie Galland Ehrlacher, Claire de March et Laurette Piani

Chaque année, le 8 mars célèbre la journée internationale des droits des femmes. En parallèle, tous les ans, depuis 2001, le prix Irène Joliot-Curierécompense plusieurs femmes de sciences avec 4 distinctions. La 22ᵉ édition de la cérémonie de remisedes prix s’est tenue à la veille de cette journée historique, mais aussi « à la veille de la cérémonie de scellement dans la Constitution du droit à l’IVG », rappelle Elisabeth Borne, laquelle était présente pour remettre le prix Jeune femme scientifique.

C’est devant l’ancienne Première ministre suscitée, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Sylvie Retailleau, l’Académie des sciences et l’Académie des technologies — les deux institutions chargées de désigner les lauréates — ainsi que d’autres heureux témoins, que 6 femmes chercheuses ont été mises à l’honneur, au sein de la Cité des Sciences et de l’industrie. Elles s’illustrent dans des disciplines variées : les mathématiques, l’informatique, la géologie, la chimie du vivant ou encore l’ingénierie. Retour sur cet événement avec Diplomeo !

Des prix doux-amers et encore du travail à faire pour l’égalité de genre en sciences

La cérémonie a été inaugurée par la remise du prix Femme, recherche et entreprise. Pour cette 22e édition, c’est Marilena Radoiu, directrice de recherche en génie chimique et environnement et fondatrice de l’entreprise Microwave Technologies Consulting, qui a été primée. 

« Avec ce prix, je veux remercier toutes les femmes extraordinaires dans le monde et celles que j’ai eu le privilège de rencontrer. Elles m’ont montré que l’on pouvait contribuer au savoir et à l’innovation en gardant toutes nos valeurs humaines », confie Marilena Radoiu lors de son discours de remerciement. Son portrait, diffusé quelques instants avant, témoigne d’un univers scientifique et d’un monde des affaires encore bien souvent dominés par des hommes : « Dans mes emplois, j’étais la seule femme dans les équipes techniques. Aujourd’hui encore, je suis très souvent la seule femme présente lors de discussions avec des partenaires. »

« Cet événement rappelle à toutes les jeunes filles et femmes qui n’oseraient pas que le champ des possibles leur est grand ouvert », Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de France, à la Cité des Sciences et de l’Industrie.

Pour Olga Paris-Romaskevich, chargée de recherche au CNRS et lauréate du Prix spécial de l’engagement, ce prix représente à la fois « de la joie et de la tristesse ». « Il y a des femmes qui souffrent de leur exclusion des sciences. Je reçois un prix indirectement à cause des souffrances des autres femmes » tient à rappeler la mathématicienne et médiatrice des sciences. « J’espère qu’un jour, on n’aura plus à attribuer ce prix parce que le problème sera résolu », conclut-elle.

Le Prix de la Femme scientifique de l’année a été remis par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Sylvie Retailleau, à Anne Canteaut, directrice de recherche en informatique à l’Inria. Si, pour cette dernière, cette récompense est « un immense honneur » et « un très très grand plaisir », la spécialiste de la cryptographie a aussi conscience de l’autocensure dont souffrent les jeunes filles et femmes. « Il ne faut pas croire que pour arriver à un certain type de métier, il faut absolument emprunter une voie royale », clame-t-elle, au recevoir de sa prestigieuse distinction.

« On ne peut imaginer un monde où la moitié des solutions sont imaginées par la moitié de la population », Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de France, à la Cité des Sciences et de l’Industrie.

Peu de temps après, c’est à la ministre, aussi présente sur scène, de décrire l’écart de genre en sciences en France, chiffres à l’appui : 28 % des étudiants en écoles d’ingénieurs sont des femmes. Si l’on se penche sur la part des femmes scientifiques et ingénieures dans la population active, elle s’élève à 9,9 %, contre 13,3 % pour les hommes. Toutefois, la ministre constate un avancement, certes lent et « largement insuffisant », qui doit pousser à continuer les efforts. Par exemple, en 2012, la part de femmes dans les disciplines scientifiques était de 46,7 %. En 2022, elle s’élevait à 49,4 %.

Des parcours différents, mais l’importance de la représentation et du soutien pour les lauréates

Cette 22ᵉ édition marque une nouveauté pour le prix Irène Joliot-Curie : ce ne sont pas une, mais trois lauréates qui reçoivent la distinction Jeune femme scientifique. Pour Sylvie Retailleau, cette triplette démontre que « la science est collective et que l’on a l’embarras du choix ».

Virginie Galland Ehrlacher, chercheuse et professeure au CERMICS, le laboratoire de mathématiques appliquées de l’École nationale des ponts et chaussées, est l’une des trois lauréates. « J’ai eu de la chance, car le fait d’être une femme n’a jamais eu la moindre incidence sur le déroulé de ma carrière », peut se targuer la mathématicienne, non sans attribuer une part de ce confort aux femmes de sciences qui ont pu déconstruire les stéréotypes de genres par le passé : « C’est probablement que les efforts de certaines, comme Irène Joliot-Curie, portent leurs fruits ».

« Par rapport aux mathématiques, les filles manquent de confiance en elles, mais ce n’est pas lié à leur nature. C’est un symptôme des violences sexistes qu’elles vivent tous les jours », Olga Paris-Romaskevich, lauréate du Prix spécial de l’engagement.

À notre micro, la mathématicienne se souvient aussi d’un professeur de mathématiques qu’elle a eu en première et terminale scientifique, « absolument excellent » et qui lui a donné le goût des maths. Alors qu’elle ne savait pas vraiment quelle voie emprunter en début de lycée, elle entame après son bac une classe prépa MPSI. Après cela, elle intègre une école Polytechnique, où là encore, elle en garde de bons souvenirs : « J’ai eu la chance d’avoir des cours extraordinaires avec des professeurs extraordinaires. C’est aussi là que j’ai rencontré mon futur directeur de thèse ».

Claire de March, chargée de recherche CNRS en chimie du vivant, est une de ses co-lauréates. Pour cette chercheuse de l’olfaction, le constat est clair : « On n’en arrive pas là sans l’aide de personne ». Pour nous, elle retrace son parcours académique « cabossé », qui part d’un bac technologique, pour « raccrocher les wagons » avec un BTS, puis une troisième année de licence. Ensuite, elle entame un master professionnel, avant de trouver sa voie en master 2 de recherche en chimie moléculaire. « J’ai rencontré des personnes qui ont cru en moi et qui m’ont dit que je pouvais le faire. Ça a été des professeurs de chimie, mon encadrant de post-doctorat, mais également mes proches et des chercheuses qui m’ont inspiré en tant que modèles, bien qu’elles ne fussent pas assez ». 

« J’ai envie de dire aux jeunes femmes qui hésitent à se lancer dans des études scientifiques, que si elles aiment les sciences, elles ne doivent pas hésiter ni avoir peur du peu de femmes dans ces domaines. Elles y ont toute leur place ! » Virginie Galland Ehrlacher, co-lauréate du prix Jeune femme scientifique.

La troisième lauréate est Laurette Piani, chargée de recherche CNRS en géologie et cosmochimie. Au moment de recevoir le prix Jeune femme scientifique, sa première pensée va aux gens qui l’ont « soutenue, inspirée et aidée » dans son parcours. Elle espère aussi, à son tour, avec cette distinction, inspirer « des jeunes femmes et filles à endosser une carrière scientifique ». Elle se souvient avoir toujours aimé et avoir été bonne en sciences. Après un bac S, elle se dirige vers une prépa PCSI, puis intègre une école d’ingénieurs en géologie « sans trop vraiment bien connaître », avant de complètement découvrir sa passion.

Pour cette chercheuse spécialiste des éléments volatils au sein du système solaire, aux disparités entre les genres, s’en ajoutent d’autres qui viennent obscurcissent les sciences : « La diversité socioculturelle qu’il y a dans notre pays n’est pas assez reflétée, à mon goût, dans les laboratoires et les instituts de recherche ». 

Même son de cloche pourOlga Paris-Romaskevich, lauréate du Prix spécial de l’engagement : « Les femmes ne sont pas les seules à être exclues des études et métiers en lien avec les mathématiques. Les personnes issues des classes populaires et les personnes racisées le sont aussi », déclare-t-elle.« Valoriser et récompenser le travail de certaines ne va pas résoudre un problème systémique d’exclusion. Nous devons d’abord activement arrêter d’exclure », conclut-elle alors son discours de remerciement.

Trouve ton diplôme
en 1 min avec Diplomeo ! Trouver mon école

Plus de contenus sur Études et vie de campus

Toutes les actualités
Ne manque aucune info pour t’orienter
Deux fois par mois, reçois une newsletter par mail avec l’actu et nos conseils sur l’orientation.
En cliquant sur "S’inscrire", tu acceptes les CGU et tu déclares avoir lu la politique de protection des données du site Diplomeo